Plantes et Microbiote #3

Troubles digestifs fonctionnels

Edito

Les plantes à la rencontre des Gastro-entérologues

Les plantes connaissent le tube digestif !

Même chez nos patients qui n’en consomment que très peu, ces viandards adeptes tout au plus d’un accompagnement frites ou pâtes, la consommation de plantes dans notre alimentation est obligatoire.

Les recommandations actuelles en termes de diététique optimale les placent en premier dans les apports journaliers. Mais il y a plante et plante.

L’utilisation des plantes pour soigner est très ancienne, et figure dans les toutes premières pharmacopées. Leur place depuis l’avènement de la pharmacologie moderne les avait reléguées au second plan. Il faut dire que les médicaments « classiques » anti-ulcéreux, les anti-inflammatoires utilisés dans les MICI, les molécules à visée hépato-biliaire ou pancréatiques ont eu leur gloire méritée.

Cependant les mésusages liés à la recrudescence des troubles fonctionnels digestifs d’une part et à la pression des « patients impatients » d’autre part ont orienté de plus en plus de médecins à revisiter les possibilités thérapeutiques des plantes médicinales.

C’est ainsi que j’ai eu l’honneur et le grand plaisir, d’initier au dernier trimestre 2018, une rencontre et des échanges avec un panel de Gastro-entérologues sur les plantes utilisables dans les troubles gastro-oesophagiens, les dyspepsies hépato-biliaires, et le syndrome de l’intestin irritable.

Ce fut très riche pour moi, médecin généraliste de formation, d’échanger avec mes pairs correspondants.

Un bon nombre de plantes thérapeutiques à visée digestive sont en même temps des aliments. Rien d’étonnant d’ailleurs à ce que leur tropisme thérapeutique porte sur la digestion elle-même, gastrique, principalement. Le fenouil, le gingembre, la réglisse régulent magnifiquement reflux, acidités gastriques et lenteurs de vidange gastrique.

Artichaut, pissenlit et radis apaisent les duodénums et colons dystoniques. D’autres plantes sont plus surprenantes, car non alimentaires. Le desmodium, parasite de la racine de cacao comme hépato-protecteur et même régénérateur ! le chardon marie de nos chemins tout autant !

J’ai pris conscience à cette occasion du besoin et du désir des spécialistes cliniques de l’appareil digestif de développer une palette d’outils plus importants.

J’ai découvert le désarroi commun entre généralistes et spécialistes d’avoir recours à des IPP pour traiter un simple reflux ou des médicaments psychotropes pour apaiser des spasmes coliques fonctionnels.

La médecine toute entière a magnifiquement su traiter les maladies aiguës depuis plus d’un siècle. Elle se bute désormais à la pathologie chronique. Les maladies chroniques digestives, en dehors des MICI bien étiquetables, ont longtemps été considérées comme purement fonctionnelles, c’est-à-dire dans le langage post-freudien qui nous colle à la peau et aux neurones depuis tant d’années, psychosomatiques !

Le 21ème siècle découvre que la plupart de nos symptômes digestifs, mais somatiques aussi au sens large, sont davantage somato-psychiques que psychosomatiques. De la découverte du fameux « deuxième cerveau », au métabolisme de la sérotonine extracérébrale, en passant par la meilleure connaissance de la structure intime du microbiote et de la paroi intestinale, notre vision des choses a changé.

Les plantes s’intègrent parfaitement dans ce nouveau paradigme.

Elles ne sont pas là pour tout bousculer et remettre en cause les molécules au bénéfice éprouvé du 20ème siècle, mais pour s’intégrer dans une palette intelligente de médicaments qui réserve le bon médicament (plante ou pas) pour le bon symptôme, le bon patient, au bon moment et pour la bonne durée.

Docteur Daniel Scimeca
Médecin généraliste, Spécialiste en plantes médicinales