Sport et MICI

SPORT ET SANTÉ

L’effet bénéfique de l’activité physique (AP) sur la santé a été largement démontré depuis plus de 20 ans.

Une activité physique régulière diminue la mortalité toutes causes confondues et est efficace pour prévenir ou améliorer de nombreuses pathologies chroniques (cardiovasculaires, pulmonaires, diabète, obésité) (1).

Concernant les pathologies digestives, l’AP a un effet préventif dans la récidive du cancer du côlon(6). Peu d’études sur les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin notamment la maladie de Crohn et la Rectocolite Hémorragique ont été réalisées.

Attention aux effets délétères dans la population générale

Lorsque la durée et l’intensité de l’effort augmentent, des effets délétères peuvent apparaître surtout chez des sujets peu entraînés : douleurs abdominales, diarrhée, pyrosis, éructations, épigastralgies, vomissements, voire hémorragies digestives hautes ou basses. Sur le plan physiopathologique, l’ischémie mésentérique est le facteur déterminant. L’effort physique entraîne une augmentation de l’activité sympathique qui induit une vasoconstriction splanchnique avec redistribution du flux sanguin vers les muscles aux dépens des organes digestifs (1,6).

Certains facteurs, individuels ou environnementaux peuvent contribuer à aggraver les symptômes : le sexe féminin indépendamment de l’effort fourni, les sujets jeunes (capacités surestimées), le climat chaud, l’hypoglycémie, l’hyperthermie et la déshydratation, la prise d’AINS, d’oestroprogestatifs, d’aspirine ou une maladie digestive sous-jacente.

Dans les MICI, l’exercice peut provoquer une légère inflammation transitoire et favoriser la libération de cytokines pro-inflammatoires exacerbant les symptômes gastro-intestinaux (3).

Mais l’activité physique régulière et bien adaptée à la personne reste très bénéfique.

PRÉVENTION PRIMAIRE : LE SPORT PROTÈGE-T-IL DES MICI ?

200 000 femmes américaines ont été suivies pendant 30 ans. L’étude prospective a permis de montrer que les femmes qui pratiquent une activité physique régulière (marche 3 fois par semaine à un rythme moyen) avaient un risque nettement inférieur (44 %) de développer une maladie de Crohn que les sédentaires. Cela n’a pas été démontré pour la RCH (7).

PRÉVENTION SECONDAIRE : LE SPORT DIMINUE-T-IL LE NOMBRE ET L’INTENSITÉ DES POUSSÉES ?

L’activité physique et la réduction du stress sont des stratégies reconnues pour la gestion des maladies chroniques, dans la maladie de Crohn il existe une relation directe entre qualité de vie et activité de la maladie (5).

Or le temps de loisirs consacré à une activité physique modérée (marche ou jardinage) chez les patients suivis pour Maladie de Crohn (MC) ou RCH est inférieur à celui recommandé pour la population générale (2).

COMMENT AMÉLIORER CET ÉTAT DE FAIT ? COMMENT Y REMÉDIER ?

La MC et la RCH évoluent le plus souvent par poussées, séparées par des périodes de rémission complète ou d’accalmie. Au moment des poussées, l’asthénie est fréquente et les troubles digestifs au 1er plan ne permettent pas la poursuite d’un sport ou d’une activité physique soutenue ; il faut alors arrêter temporairement. En phase de rémission, la reprise doit être progressive en privilégiant d’abord les activités douces (marche, natation, vélo à petite vitesse) puis des sports plus intenses (tennis, sport collectif) peuvent être repris.

Même en dehors des poussées, l’asthénie persiste fréquemment, limitant l’AP et entraînant une dégradation de la qualité de vie et une augmentation du stress.

RÔLE DE L’ALIMENTATION

Lors d’une poussée, l’alimentation est souvent restreinte, la diarrhée entraîne des pertes hydro-électrolytiques et protéiques. Il y a une majoration des besoins énergétiques en cas de fièvre, d’infection ou d’abcès, ainsi que des besoins en protéines liés à l’inflammation ou à la corticothérapie. Cela entraîne une perte de poids.

En cas d’amaigrissement important, la dénutrition prédomine volontiers sur les masses musculaires. Avant de reprendre une activité physique, il convient donc de restaurer un bon état nutritionnel grâce à des apports caloriques suffisants, éventuellement de compléter par des vitamines, des sels minéraux et des oligo-éléments.

RÔLE DE L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE ( ETP ) ET DU COACH SPORTIF

« L’ETP a pour objectif de rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie ».

Le gastroentérologue peut proposer à ses patients de participer à un programme d’ETP pendant lequel des séances avec un coach sportif sont organisées.

La séance commence par un tour de table ou chacun explique ses difficultés, se poursuit par un échauffement simple suivi d’un renforcement musculaire puis gainage en insistant sur la ceinture abdominale et le périnée.

Dans les séances suivantes, une partie plus ludique peut être envisagée, type chorégraphie en musique ou L.I.A. (Low Impact Aerobic). La notion de progression restant prioritaire.

Les séances sont un moment important de solidarité ou les patients reprennent confiance dans leur corps et remettent le pied à l’étrier.

QUELS SPORTS ?

Tous les sports sont autorisés, chacun adapte son choix en fonction de ses capacités et de ses désirs.f

  • La marche reste facile dès que la maladie est stabilisée.
  • Le yoga peut être pratiqué à tout moment, le pilate et le stretching également sauf en post opératoire immédiat.
  • Les sports d’endurance course à pied, vélo, natation, golf, sont recommandés.
  • Le tennis et squash quand tout va bien.

PROBLÈMES PARTICULIERS DES STOMIES

La course à pied : vérifier la bonne adhérence du support. Éventuellement une ceinture pour stomie garantit le bon maintien de la poche.

La natation : vider la poche avant de se mettre à l’eau et vérifier la bonne adhérence. Si la poche est équipée d’un filtre, il faut recouvrir celui-ci avec une pastille autocollante.
L’eau de piscine est en général très chlorée et le chlore sur la peau empêche l’adhésif de coller.
Après une séance de plongée ou de natation en piscine, il convient de bien nettoyer la peau autour de la stomie avec de l’eau et du savon de Marseille, de bien la rincer et de la sécher avant de poser une nouvelle poche.
Pour cacher la stomie, il existe des maillots de bain spéciaux. Il est recommandé d’avoir un 2ème maillot de bain identique en cas de nécessité.

Le fitness : il est conseillé de ne pas porter de charge lourde, car cela augmente les risques de développer une hernie.

Le sport d’équipe : il faut utiliser une ceinture pour stomie ou une gaine.

La Plongée : même recommandation que pour la natation (8).

PROBLÈMES PARTICULIERS DES MICI AVEC ATTEINTES ARTICULAIRES

Lors des périodes de poussées, le repos s’impose.

Lors des périodes non inflammatoires et non douloureuses, l’essentiel du traitement est physique avec une kinésithérapie régulière, des séances intermittentes de physiothérapie, d’hydrothérapie et d’exercices réguliers afin de lutter contre l’enraidissement rachidien, risque évolutif commun des Sports Adaptés (SpA).

D’autre part l’activité physique régulière diminue le risque d’apparition d’ostéoporose chez des patients souvent exposés aux corticoïdes.

EXPÉRIENCE AU SEIN DE L’AFA : L’ASCENSION DU MONT-BLANC

Décidés à se battre envers et contre tout, quitte à se priver de nourriture s’il le faut, 6 malades se sont engagés dans une aventure humaine et sportive à la découverte de la haute montagne.

Malgré leurs inquiétudes, ils ont voulu dépasser leur handicap dans des ascensions de plus en plus hautes avec comme objectif final le sommet du Mont Banc.

Mais l’aventure de cette cordée solidaire n’était pas seulement sportive, ils ont dû trouver le courage de parler de leur maladie, de dépasser les tabous qui les entourent, dans le but de faire connaître les MICI et dans l’espoir de faire avancer la recherche.

CONCLUSION

La pratique régulière d’un sport, participe à l’équilibre général de l’individu. Avoir une bonne condition physique suppose de faire du sport au moins trois fois par semaine, à raison d’au moins vingt à trente minutes à chaque séance. Le sport aide ainsi à surmonter les stress de tous ordres, améliore la qualité de vie en particulier l’asthénie chez les patients suivis pour maladie de Crohn et rectocolite hémorragique (3,4).

Références

  1. Debeaumont. D et al. [Exercise and digestive diseases]. Acta Endosc, 2015 ;45 :274-279.
  2. Mack DE, et al. Leisure-time physical activity in Canadians living with Crohn disease and ulcerative colitis: population-based
    estimates. Gastroenterol Nurs. 2011 Jul-Aug;34(4):288-94.
  3. Bilski J, et al. Can exercise affect the course of inflammatory bowel disease? Experimental and clinical evidence. Pharmacol Rep.
    2016 Aug;68(4):827-36.
  4. Ng V, et al. Low-intensity exercise improves quality of life in patients with Crohn’s disease. Clin J Sport Med. 2007 Sep;17(5):384-8.
  5. Crumbock SC, et al. Physical activity, stress, disease activity, and quality of life in adults with Crohn disease. Gastroenterol Nurs.
    2009 May-Jun;32(3):188-95.
  6. de Oliveira EP, et al. The impact of physical exercise on the gastrointestinal tract. Curr Opin Clin Nutr Metab Care. 2009
    Sep;12(5):533-8.
  7. Khalili H, et al. Physical activity and risk of inflammatory bowel disease: prospective study from the Nurses’ Health Study cohorts.
    BMJ. 2013 Nov 14;347:f6633.
  8. www.stomie.org/Plonger_sous-marine_avec_une_stomie.pdf
FERRING