Grossesse et MICI

Etre porteur de MICI n’empêche pas de devenir mère et il est préférable d’évoquer la grossesse avec son gastro-entérologue.

Quelques précautions sont de mise, mais il est possible d’envisager et de mener à bien une grossesse sans véritable difficulté.

La fertilité du couple est-elle modifiée par la MICI ?

  • Lorsqu’un homme ou une femme sont atteints de MICI, la fertilité du couple n’est pas modifiée sauf durant les périodes d’activité de la maladie, en particulier lors d’un amaigrissement important de la femme avec aménorrhée.
  • Une poussée de maladie de Crohn peut réduire la fertilité chez la femme.
  • Chez la femme, les interventions chirurgicales antérieures pelviennes ou les récidives répétées susceptibles d’entraîner des adhérences et l’atteinte inflammatoire des trompes et des ovaires rendent plus aléatoire la fécondation et peuvent avoir une incidence sur la fertilité.
  • Chez un homme ayant subi une amputation du rectum, une impuissance ou des troubles de l’éjaculation peuvent s’installer.
  • Les traitements par sulfasalazine (salazopyrine®), methotrexate ou infliximab peuvent altérer la qualité du sperme et réduire les chances de fécondation mais cet effet est réversible.

Les MICI influencent-elle la grossesse ?

  • La contraception est nécessaire quand le traitement en cours comporte un médicament non autorisé pendant la grossesse.
  • Lorsque la maladie est active au moment de la conception, les fausses couches sont fréquentes. Il est donc souhaitable de ne pas envisager de grossesse tant que la maladie n’est pas parfaitement stabilisée sous traitement.
  • Lorsque la conception survient en période de quiescence de la maladie et en absence de poussée, la grossesse et l’accouchement se déroulent normalement dans la majorité des cas.
  • Des complications sont possibles si une poussée survient pendant la grossesse (fausse couche spontanée, prématurité, hypotrophie).
  • Les accouchements avant terme sont plus fréquents en cas de MICI.
  • Un risque possible de prématurité et d’hypotrophie a été rapporté au cours de la maladie de Crohn et de la RCH.
  • Aucune étude n’a montré un risque majoré de malformation (liée à la MICI) chez l’enfant.
  • La patiente doit certes être suivie de façon attentive et plus étroite que de coutume (en particulier pendant le dernier trimestre).

La grossesse influence-elle les MICI ?

  • Le risque de rechute de la maladie lors le la grossesse ou la période du post-partum n’est pas augmenté (par rapports aux femmes non enceintes atteintes de MICI) chez les patientes atteintes de maladie de Crohn, mais il l’est chez celles atteintes de RCH. Lorsqu’une rechute survient, c’est le plus souvent au cours du premier trimestre de la grossesse.
  • Lorsque la maladie est active au moment de la conception : la MICI peut s’aggraver (1/3 des cas), rester stable (1/3 des cas) ou s’améliorer jusqu’à l’accouchement (1/3 des cas). Il est donc logique de ne pas envisager de conception tant que la MICI reste évolutive.
  • Le traitement médicamenteux de la MICI doit faire l’objet de discussions entre la patiente (et son partenaire), le gastro entérologue et le gynécologue.
  • Cette discussion doit être abordée avant la conception afin de prendre la bonne décision avant la grossesse. En règle générale:
    • s’il existe un traitement d’entretien de la MICI lorsque la grossesse est déclarée, il est préférable de le maintenir (sauf si ce traitement est contre-indiqué pendant la grossesse)
    • si une poussée survient au cours de la grossesse, la plupart des études ont montré que la mésalazine (à des doses inférieures à 3 g/j) et les corticoïdes pouvaient être utilisés, la sulfasalazine est également bien tolérée à condition de l’associer à de l’acide folique
    • les Anti-TNF si nécessaire peuvent être utilisés en cas de poussée pendant la grossesse.

L’accouchement par voie naturelle est-il possible ?

  • Il est préférable d’éviter l’épisiotomie en cas de maladie de Crohn en raison de la fréquence des atteintes périnéales, mais elle est préférable à une déchirure périnéale incontrôlée.
  • La césarienne est recommandée en cas d’atteinte périnéale ou d’atteinte rectale.
  • La césarienne systématique n’est pas obligatoire, on peut autoriser l’accouchement par voie basse chez les patientes en rémission ou lorsque l’activité est modérée.
  • En cas d’anastomose iléo-anale, il n’y a pas de contre-indication formelle à un accouchement par voie naturelle, les modalités de l’accouchement ne doivent être décidées qu’à partir de considérations obstétricales.
  • Les patientes porteuses de MICI ont plus de problème d’incontinence fécale persistante après accouchement par voie basse que les femmes non atteintes.

Existe-t-il un risque de transmission de la maladie à l’enfant ?

  • Ce risque existe mais il est faible, 2 à 3 % pour la maladie de Crohn, 0,5 à 1 % pour la RCH si un des parents est atteint, mais
    il s’élève à 30 % si les 2 parents sont atteints.

Quel risque de rechute en post partum ?

  • Le risque n’est pas augmenté si la patiente poursuit sont traitement d’entretien.

Une patiente porteuse de MICI peut-elle allaiter ?

  • L’allaitement ne modifie pas l’évolution de la MICI.
  • Certains médicaments pris par la mère passent dans le lait maternel. Des précautions sont à prendre (voir plus loin).
  • En cas de traitement par ciclosporine, thalidomide, méthotrexate l’allaitement est contre indiqué et à éviter sous
    ciprofloxacine et métronidazole.

Médicaments autorisés (grossesse et allaitement)

Il existe un réel bénéfice apporté par les traitements (dont les anti-TNF) pour la mise en rémission et son maintien pendant la grossesse par rapport aux complications d dues aux poussées.

BUDESONIDE

Les données publiées sont nombreuses et rassurantes.

CORTICOIDES

Ils peuvent être utilisées sans restriction pendant la grossesse. A des doses >50 mg/j (methylprednisolone), l’allaitement est envisageable en laissant passer si possible au moins 4 heures entre la prise et la tétée.

ANTI-TNF

Les enfants de mère traitée jusqu’à l’accouchement par anti-TNF doivent être considérés comme immunodéprimés jusqu’à l’âge de six mois (vaccins vivants contre-indiqués).

Les recommandations actuelles (avis d’expert) autorisent l’utilisation des anti-TNF jusqu’à la fin du 2ème trimestre (24-26 SA pour certains). Il convient de limiter leur utilisation durant le 3ème trimestre si la mère est en rémission

Tous les anti-TNF sont excrétés en petite quantité dans le lait maternel. Aucun effet secondaire n’a été rapporté sur le nombre limité d’enfants dans cette situation. Il faut certainement, si cela est possible, doser le médicament et les anticorps dans le lait et chez les enfants exposés.

AZATHIOPRINE

Risque accru d’infections materno-fœtales (à CMV surtout). Les données de la littérature ne contre-indiquent pas sont utilisation
durant la grossesse même si sur le Vidal il existe des restrictions chez l’animal.

Médicaments avec précautions

5-ASA et Sulfasalazine

La sulfasalazine et le 5-ASA administrés à des doses inférieures à 3g/j n’ont aucun effet indésirable spécifique au cours de la grossesse mais l’AMM limite sa posologie à 2g/ j pendant la grossesse.

L’utilisation de Sulfasalazine pendant la grossesse nécessite un traitement complémentaire par acide folique.

Durant l’allaitement, il convient de ne pas dépasser les 2 g/j car il existe des risques de diarrhée chez le nourrisson.

METRONIDAZOLE ET CIPROFLOXACINE

Ces médicaments peuvent être bénéfiques en cure courte, pour des pochites ou des lésions périnéales. Ils sont déconseillés pour des traitements prolongés.

Ils sont excrétés dans le lait maternel, et il vaut mieux les éviter pendant la lactation.

Ils sont déconseillés lors du 1er trimestre de grossesse.

Ciclosporine, Tacrolimus :

Les données sont issues de l’utilisation de ces molécules dans la prévention du rejet lors des greffes; aucun effet secondaire n’a été signalé pendant la grossesse.

Ciclosporine à éviter pendant l’allaitement.

VEDOLIZUMAB ET USTEKINUMAB :

Pas de données solides disponibles, la plus grande prudence est recommandée durant la grossesse.

Pour tout médicament dont la prescription est envisagée pendant la grossesse, on peut consulter le site : www.lecrat.org

Références utiles :

  • Marteau Ph, Beaugerie L, Schénowitz G, Tucat G. MICI et grossesse : Prise en charge des MICI. John Libbey Eurotext Ed. Paris 2003, 82-90
  • Benech N et al, MICI et grossesse, HGOD, vol 23 n°2, février 2016
  • Mahadevan U et al. The London position statement of the World Congress of Gastroenterology on Biological Therapy for IBD with the European Crohn’s and Colitis Organisation: Pregnancy and Pediatrics. Am J Gastroenterol 2011;106:214–223
  • Janneke van der Woude C, et Al. for the European Crohn’s Colitis Organisation (ECCO).European evidenced-based consensus on reproduction in inflammatory bowel disease. Journal of Crohn and colitis 2015; 4: 107-124