La rectocolite hémorragique est une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. L’une de ses manifestations est le besoin impérieux d’aller à la selle avec un délai très court. C’est l’urgence fécale.
Pourquoi a-t-on des urgences fécales ? Plusieurs mécanismes peuvent expliquer cette urgence fécale ?
L’inflammation qu’il y a au niveau du rectum va entraîner une hypersensibilité et des spasmes au niveau du rectum lorsque les matières fécales arrivent.
Il y a également des phénomènes de cicatrisation à type de fibrose qui font que le rectum va être moins distensible. De ce fait, lorsque les selles vont arriver, il va être plus difficile de se retenir.
Cette difficulté à se retenir sera d’autant plus importante que les selles sont liquides.
Quel impact sur la qualité de vie ? Pourquoi est-ce mal vécu ?
L’urgence fécale est donc une difficulté à retenir ses selles, à différer leur évacuation.
La gravité de l’urgence fécale va être liée à trois éléments : le temps de report, quelques secondes, quelques minutes, c’est différent, à la fréquence des accidents de perte de selles et au comportement que l’on va avoir pour éviter ces accidents.
Repérer les toilettes, port de couches, éviter de sortir, se couper de ses amis.
Une étude récente menée aux États-Unis, dans cinq pays d’Europe et au Japon a bien étudié ce problème. Elle a montré d’ailleurs un décalage entre le ressenti du patient et celui du médecin qui suit ces mêmes patients.
L’urgence fécale et la crainte d’une incontinence anale étaient ainsi très souvent responsables d’une diminution de participation aux activités professionnelles, scolaires, sociales et des activités physiques. 50% des patients disaient avoir diminué leur activité sexuelle. Cela concernait 60% des femmes et 45% des hommes. Enfin, l’urgence fécale est associée à un état de fatigue inhabituelle, dégradant nettement la qualité de vie des patients. On s’exclut.
Quel impact sur le pronostic et l’évolution de la maladie ?
C’est une maladie invalidante puisque plus d’un patient sur deux pense que la maladie impacte sa qualité de vie, plus que la migraine ou l’asthme par exemple, avec un impact psychologique quant aux effets à long terme de la maladie et un stress face à l’inconnu de l’évolution de cette maladie.
Ceci est d’autant plus vrai que les urgences fécales sont présentes même lorsque le patient est en rémission de sa maladie. Enfin, certains travaux montrent que la persistance d’urgences fécales sous traitement serait associée à une mauvaise évolution de la maladie avec moins de rémissions cliniques et endoscopiques.
Comment aborder l’urgence fécale en consultation ?
Le besoin impérieux d’aller à la selle, c’est à dire l’urgence fécale, est considéré par les patients comme l’un des symptômes les plus gênants de la maladie.
Lorsque l’on interroge des patients sur la gêne occasionnée par leur maladie, les patients mettent l’urgence fécale en deuxième position. Lorsqu’on pose la même question au médecin, ils la mettent en sixième position. La perception de ces symptômes, est donc différente selon que l’on interroge le patient ou le médecin. Concernant le patient, une fois sur deux, il est embarrassé d’aborder ce thème avec son médecin. Plus rarement, mais parfois quand même, il pense que le médecin ne lui sera d’aucune aide, ou alors que, de toute façon, la consultation est beaucoup trop courte.
Du côté du médecin, ceux qui ne posent pas la question ne le font pas parce qu’ils attendent que ce soit le patient qui pose la question, ou alors parce qu’ils n’ont pas le temps, la consultation est trop courte, ou alors qu’ils se sentent embarrassés de poser la question. Ils ont peur d’embarrasser également le patient. Ou alors également ils pensent que ce problème-là n’est pas très important en réalité pour le patient.
Pourtant, aborder ce sujet lors de la consultation est extrêmement important parce que sinon, qu’est ce qu’il se passe ?
Le patient va aller chercher des informations sur Internet, sur les blogs, sur les forums, avec très souvent des mauvaises solutions. Or, des solutions existent et peuvent être parfaitement expliquées par votre médecin.
Quelques conseils alimentaires, des ralentisseurs du transit. Il existe également des applications sur les smartphones permettant de repérer des toilettes. On peut également donner des cartes prioritaires d’accès aux toilettes dans certains endroits et il est également important de s’informer auprès des associations comme l’AFA.
En résumé
L’urgence fécale est un symptôme indépendant et un élément important de la diminution de la qualité de vie des patients.
L’urgence fécale est sous-évaluée car pas toujours recherchée par le médecin et pas toujours signalée par le patient. Des stratégies de communication sont donc utiles pour la rechercher, car des solutions existent.
Pour en savoir plus, vous pouvez télécharger My MICI Book sur le site du CREGG.
Le Dr Thierry Higuero vous aide à tout comprendre sur les besoins impérieux en cas de rectocolite hémorragique.