Questions autour du cancer

Des cancers du tube digestif peuvent survenir au cours des MICI après un certain nombre d’années d’évolution.

Bien qu’au cours de la maladie de Crohn, il soit possible de voir se développer un cancer du grêle*, le problème essentiel concerne les cancers du côlon et du rectum qui peuvent survenir au cours de la rectocolite hémorragique et au cours de la maladie de Crohn.

Si dans la population générale le cancer du côlon est une affection fréquente, il faut savoir que un pour cent de ces cancers surviennent chez des patients porteurs de MICI.

Cancer colique et rectocolite hémorragique

Un porteur de MICI a-t-il plus de risque d’avoir un cancer du côlon ?

Oui. On considère que l’existence d’une maladie inflammatoire du côlon favorise le risque de cancer colique. Toutefois ce risque n’apparaît qu’après de longues années d’évolution de la maladie inflammatoire.

Au cours de la rectocolite hémorragique, le risque de développer un cancer colique est sur les dernières études de 5% à 30 ans d’évolution. On estime que ce risque est supérieur à celui de la population générale après 10 ans d’évolution. Ce risque est d’autant plus important que la maladie inflammatoire est plus étendue, mal contrôlée médicalement et qu’elle est associée à une cholangite sclérosante.

Pourquoi y a-t-il plus de risque d’avoir un cancer du côlon lorsqu’on est porteur d’une MICI ?

Il faut savoir que, chez les patients qui ne souffrent pas de MICI, le cancer du côlon se développe le plus souvent à partir d’un polype, c’est-à-dire d’une tumeur bénigne qui apparaît au niveau de la muqueuse du côlon.

Après un certain nombre d’années, au niveau de la muqueuse du polype, apparaissent des anomalies architecturales, on parle de dysplasie. Des anomalies du même type peuvent être observées au cours de la rectocolite hémorragique sur une muqueuse plane et sont à l’origine du cancer. C’est ce type d’anomalie qui est recherché par des biopsies multiples systématiques réalisées dans le cadre de la prévention du cancer colique des MICI.

En dehors des coloscopies faites dans le cadre de poussée de la maladie, faut-il faire des coloscopies pour dépister des prémices de cancer colique ?

Oui. La coloscopie* est l’examen de référence dans le dépistage du cancer du côlon. Chez les patients ayant une MICI avec atteinte colique, des coloscopies de surveillance sont indispensables en dehors de toute manifestation clinique. Le but n’est pas de dépister un cancer au début, mais plutôt de détecter des anomalies précancéreuses à un stade précoce.

Quand débuter cette surveillance ?

Tout dépend de la localisation, de l’étendue de la maladie et de son ancienneté.

Chez tous les patients avec une RCH une coloscopie de référence doit être réalisée 6 à 8 ans après le début des symptômes.

Quand la maladie est limitée au Rectum un programme régulier de surveillance n’est pas nécessaire.

En revanche l’existence d’une cholangite sclérosante primitive associée incite à débuter la surveillance immédiatement, quelle que soit l’étendue de la maladie et son ancienneté.

La surveillance par coloscopie après la première coloscopie dépendra du profil à risque du patient qui sera déterminé par l’extension de la maladie, la sévérité endoscopique et/ou histologique, la présence de pseudopolype, d’une cholangite sclérosante et d’antécédents familiaux de cancer colorectal.

Si le risque du patient est élevé une surveillance régulière par coloscopie après la première coloscopie se fera tous les 1 à 2 ans et si le risque est faible tous les 3 à 4 ans.

Comment faire cette surveillance ?

Seule la coloscopie permet une surveillance adaptée, car elle seule permet la réalisation de biopsies*.

Les examens de selles, les radiographies du côlon sont donc inutiles dans cette indication. Au cours de la coloscopie, de multiples biopsies* seront réalisées sur l’ensemble du côlon, environ tous les 10 cm. Le gastro-entérologue réalisant la coloscopie pourra être amené à réaliser une coloration (chromo-endoscopie) qui permettra de repérer des zones suspectes et de cibler les biopsies. Ces prélèvements seront confiés à un anatomopathologiste qui recherchera des signes de dysplasie*.

Que fait-on si l’on découvre une dysplasie* ?

La découverte d’une dysplasie*, si elle est confirmée par un autre anatomopathologiste, est l’indication d’une colectomie totale avec de préférence proctectomie* s’il s’agit d’une dysplasie* de haut grade.

En cas de dysplasie* de bas grade, un contrôle endoscopique 3 à 6 mois plus tard sera réalisé et en fonction une colectomie pourra se discuter.

Que fait-on si l’on ne découvre pas de dysplasie* ?

Lorsque les biopsies* réalisées au cours de la coloscopie n’ont pas révélé de dysplasie*, il est impératif de poursuivre le programme de surveillance qui consistera à réaliser une coloscopie en fonction du profil à risque du patient.

Si le risque du patient est élevé une surveillance régulière par coloscopie après la première coloscopie se fera tous les 1 à 2 ans et si le risque est faible tous les 3 à 4 ans.

Peut-on prévenir la survenue d’un cancer colique ou d’une dysplasie ?

Bien que les données actuelles soient parcellaires, il semble exister un rapport-bénéfice/ risque en faveur d’un traitement continu par 5-ASA à faible dose chez tout patient porteur de MICI touchant le côlon.

Cancer colique et maladie de Crohn

En ce qui concerne la maladie de Crohn, on dispose de beaucoup moins de données. Toutefois, on tend à proposer le même programme de surveillance pour les localisations coliques de la maladie de Crohn que pour la rectocolite hémorragique.

Cancer du grêle et maladie de Crohn

Les cancers du grêle* sont tout à fait exceptionnels dans la population générale. Au cours de la maladie de Crohn touchant l’intestin grêle*, dans les formes très évolutives et après plus de 25 ans d’évolution, le risque est certes plus élevé que dans la population générale, mais reste minime. Compte tenu de cet élément, il n’est pas justifié de proposer un programme de surveillance spécifique.

Cancers extra colique et MICI

Les patients atteints de MICI, et en particulier les RCH, présentent un risque plus élevé de cholangiocarcinome que la population générale. Cette augmentation de risque est principalement causée par l’association entre ces cancers et la CSP (Cholangite Sclérosante Primitive).

Les patients atteints de MICI ont plus de risque à développer des hémopathies malignes. Comparativement à la population générale, les patients atteints de RCH sont beaucoup plus susceptibles de développer une leucémie, tandis que ceux atteints de MC présentent un risque plus élevé de lymphome, en particulier de lymphome non hodgkinien.

Risque de cancer lié au traitement des MICI

Au cours des MICI, il est fréquent d’être amené à utiliser des immunosuppresseurs.

Ces médicaments, en favorisant une diminution des défenses immunitaires, sont susceptibles de favoriser l’apparition de cancer et en particulier de lymphome.

L’étude CESAME a montré un surrisque de lymphome surtout chez les patients de plus de 65 ans prenant de l’azathioprine au long cours qui peut être inversé par l’arrêt du traitement. Il existe également un sur risque de cancers cutanés (non mélanocytaire) et des voies urinaires.

Il convient donc de bien se surveiller lors de la prise de ce traitement et de se poser la question avec son médecin d’interrompre ou de changer de traitement après quelques années si la maladie le permet.

Pour les biothérapies le surrisque de cancer n’est pas démontré en dehors d’un léger surrisque de mélanome et de lymphomes avec les anti TNF dans des populations à risque.

Le dernier consensus européen confirme chez les patients traités par thiopurines un risque supérieur de cancer. Il n’existe actuellement aucune preuve d’une augmentation du risque global de cancer chez les patients traités uniquement avec des anti-TNF.

Pour prévenir ce type de complications rares, il important d’établir une surveillance régulière avec son médecin et d’autres spécialistes en réalisant des bilans biologiques de surveillance du traitement, des consultations de gynécologie et de dermatologie annuelles si nécessaires.

Vis-à-vis des sur risques de cancers cutanés, il faudra utiliser des mesures de protection solaire tout au long de la vie et mettre en place une surveillance régulière de la peau par un dermatologue.