Les signes de la maladie

Bien que la maladie de Crohn et la rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) fassent partie d’un même groupe de maladies – les MICI – leur expression clinique et leur évolution sont différentes.

Nous examinerons donc successivement l’une et l’autre.

En revanche, les explorations conduisant au diagnostic et utiles à la surveillance sont les mêmes.

C’est pourquoi elles sont regroupées à la fin du chapitre

LA MALADIE DE CROHN

Histoire naturelle et localisation

La véritable histoire naturelle de la maladie de Crohn (MC) n’existe pas, car pratiquement aucun patient atteint de MC ne reste non traité au cours de son évolution, mais il est possible de se faire une idée de l’évolution naturelle. La maladie de Crohn est une maladie qui dure toute la vie, avec des périodes de rechute et de rémission.

Chez les adultes, la localisation de la maladie reste assez stable dans le temps. Cependant, les cycles répétés d’inflammation entraînent une transition de la maladie vers une forme sténose et/ou pénétrante (fistule).

Le segment le plus touché du tractus gastro-intestinal est l’iléon terminal.

La maladie est localisée dans plus de 90% des cas dans les trois sites principaux : gros intestin exclusivement, maladie isolée de l’intestin grêle et atteinte combinée du petit et du gros intestin.

Environ le tiers des patients présente une maladie du gros intestin, un tiers une maladie iléocolique et un tiers une maladie de l’intestin grêle.

Des lésions de maladie de Crohn au niveau œsophagien, gastrique et/ou duodénale surviennent chez 1 à 4 % des patients.

Une maladie périanale est souvent associée à une MC recto-anale concomitante, mais peut survenir comme lésion initiale chez 2 à 5 % des patients nouvellement diagnostiqués.

Les symptômes

La maladie peut s’exprimer par des signes digestifs, mais également par des signes non digestifs (on parle alors de manifestations extra-digestives de la maladie, ce qui est également vrai pour la recto-colite).

Les signes digestifs

La maladie peut toucher tous les segments du tube digestif (de la bouche à l’anus), de ce fait les modes de présentation clinique peuvent être très différents. Néanmoins on distingue principalement 4 symptômes d’appels :

  • Des douleurs qui peuvent être de siège et d’intensité variable.
  • De la diarrhée, là encore de manière très variable (parfois abondantes s’accompagnant d’une mauvaise absorption des aliments, parfois modérée, voire alternant avec des épisodes de constipation).
  • Des signes digestifs spécifiques : présence de sang ou de glaires dans les selles, parfois de fausses envies d’aller à selles.
  • Un retentissement variable sur le poids (amaigrissement) et l’état général (fatigue excessive notamment, éventuellement de la fièvre).

En fonction de la localisation sur le tube digestif, certains signes peuvent prédominer, par exemple :

  • En cas d’atteinte de la partie terminale de l’intestin grêle (iléon) prédomineront les douleurs et la diarrhée.
  • En cas d’atteinte du gros intestin (côlon) notamment dans sa partie terminale (rectum) prédomineront la présence de glaires et de sang avec des fausses envies.

Les différentes localisations de la maladie de Crohn :

  • Le grêle* terminal est atteint isolément dans 29 % des cas.
  • L’iléon* et le cæcum* dans 50 % des cas.
  • L’ensemble du côlon droit et une partie du côlon transverse dans 19 % des cas, les lésions siègent dans la partie terminale du côlon : rectum et sigmoïde dans 2 % des cas.

Deux formes particulières de révélation sont cependant à isoler :

➤ La forme pseudo-appendiculaire (comme une appendicite aiguë avec des douleurs, de la fièvre) surtout fréquente chez l’enfant, le diagnostic pouvant alors être fait aux décours de l’intervention chirurgicale ou lors de l’échographie pré-opératoire.

➤ Les formes dites ano-périnéales lorsque la maladie touche l’anus avec deux types de manifestations initiales :

  • les fissures qui sont des « coupures » au niveau de l’anus avec des douleurs lors de la selle,
  • les fistules (communications entre tube et peau par exemple et se manifestant par un écoulement) et les abcès (cavité pleine de pus très douloureuse avec de la fièvre).

Dans le suivi évolutif, on apprend souvent au patient à évaluer douleurs et nombre de selles non formées pour la maladie de Crohn et dans la RCH la présence de saignements et le nombre de selles au-delà du nombre habituel.

Les manifestations extra-digestives

Présentes dans environ 20% des cas, elles peuvent toucher différents organes :

  • Les articulations avec des arthrites (inflammation de l’articulation qui est chaude, gonfllée et douloureuse), isolée ou touchant plusieurs articulations (poly-arthrite).
  • La peau avec des ulcérations ou un érythème noueux (boules sous la peau, bleutées surtout au niveau des jambes).
  • L’œil avec des conjonctivites ou des uvéites.
  • Le foie.
  • Etc..

Ces manifestations sont plus fréquentes en cas d’atteinte du côlon et peuvent parfois être le signe d’appel, le diagnostic étant alors plus difficile.

Évolution de la maladie de Crohn

La maladie de Crohn est une maladie chronique qui évolue le plus souvent par poussée clinique, entrecoupée de phases de « rémission » plus ou moins prolongée. Paradoxalement, la maladie peut continuer à évoluer silencieusement entre ces phases symptomatiques, ce qui rend nécessaire un suivi médical régulier. Les poussées sont d’intensité variable, stratifiées schématiquement à l’aide de différents scores en poussée minime, modérée ou sévère.

Elle se révèle le plus souvent chez l’adulte jeune (entre 20 et 30 ans), mais peut également se révéler chez l’enfant ou chez l’adulte plus tardivement vers la soixantaine.

Le diagnostic différentiel avec une atteinte digestive notamment infectieuse ou iatrogène est parfois difficile lors de la première crise, nécessitant un suivi prolongé pour aboutir au diagnostic de certitude de maladie de Crohn.

La vraie question pour le médecin, et surtout pour le patient, est de connaître à l’avance l’évolution. La réponse est difficile.

Le médecin se servira de scores cliniques, de résultats biologiques, et de résultats morphologiques (coloscopie et examens radiologiques) pour évaluer la maladie. Mais c’est surtout le suivi et la réponse aux différents traitements disponibles qui permettra de connaître le profil évolutif de chaque malade. L’objectif idéal est la disparition de l’inflammation intestinale appelée «cicatrisation muqueuse» qui permet de prévenir la survenue de complications. On dispose aujourd’hui de nouveaux outils de surveillance non invasifs dont le dosage d’un marqueur inflammatoire dans les selles, la calprotectine, qui permet d’estimer cette cicatrisation en limitant les examens pénibles pour le patient.

On décrit ainsi différentes formes évolutives de la maladie : on peut observer des formes récurrentes de la maladie bénignes ou sévères, des formes actives en permanence nécessitant un traitement de fond. Il existe aussi des formes uniques.

Des complications peuvent émailler l’évolution de la maladie (cf. ci-dessous) avec trois formes principales :

  • Les formes sténosantes avec constitution d’un rétrécissement d’un ou de plusieurs segments du tube digestif.
  • Les formes perforatives ou fistulisantes pouvant s’accompagner d’abcès.
  • Les formes inflammatoires.

Les complications de la maladie

La plupart des complications peuvent être évitées ou stoppées dans leur évolution par le traitement. D’où la nécessité de suivre correctement la prescription et les conseils du médecin et de se faire suivre régulièrement par celui-ci.

En dehors de la fiistule* ou des sténoses, les complications sont rares.

La fistule

La complication la plus fréquente est la fistule. Elle est due à des phénomènes inflammatoires avec constitution d’un abcès qui finit par s’ouvrir dans les organes voisins. Ainsi la fistule met en communication le segment intestinal malade avec un autre segment digestif, ou avec un organe du voisinage (vessie, organes génitaux chez la femme, ou peau).

La constitution d’une fistule* s’accompagne de douleurs, d’une altération de l’état général et de fièvre.

L’occlusion intestinale sur sténose digestive

Elle est la conséquence du rétrécissement d’un segment digestif ; elle cède le plus souvent à un traitement médical, mais peut nécessiter un traitement chirurgical.

La perforation intestinale est rare

Elle constitue une urgence chirurgicale en raison des risques liés à la péritonite aiguë.

Les hémorragies

Les lésions intestinales peuvent saigner, mais ces hémorragies sont généralement très discrètes.

Le risque de survenue d’un cancer intestinal

Il est exceptionnel. Sa prévention passe par des contrôles endoscopiques réguliers essentiellement dans les formes touchant l’ensemble du gros intestin après un certain temps d’évolution.

Mais aussi :

  • L’état inflammatoire et la malabsorption intestinale des aliments peuvent parfois être responsables d’une anémie, de la présence de graisse dans les selles, de carences vitaminiques, et d’une fuite des protéines ; le tout pouvant aboutir à un état de dénutrition avec amaigrissement et œdèmes.
  • Les thromboses veineuses et artérielles, plus fréquentes lors des poussées et qui peuvent être prévenues par un traitement anticoagulant.
  • Le risque de calculs de la vésicule biliaire est plus élevé que dans une population normale, de même que celui de calculs rénaux.
  • Une surcharge en graisse du foie (stéatose) peut exister.
  • Une diminution de la teneur en calcium des os doit être recherchée (ostéopénie voire ostéoporose) et prévenue.

La surveillance de la maladie

La surveillance est indispensable : elle permet d’adapter le traitement, de juger de l’efficacité de celui-ci, et de contrôler l’absence de complication. Elle est essentiellement clinique et biologique avec le dosage de la calprotectine fécale. L’endoscopie* et l’imagerie occupent une place plus limitée, mais peuvent être nécessaires dans la surveillance chez certains patients. La pratique d’une coloscopie* à intervalles réguliers (avec biopsies*) après un certain temps d’évolution de la colite inflammatoire, a pour seul objectif de dépister d’éventuelles lésions « précancéreuses ».

Chaque patient est un cas particulier

En réalité, il n’est pas possible de codifier un suivi médical standard.

Le choix et le rythme des explorations sont fonction du tableau clinique, de l’importance des rechutes, de l’extension de la maladie et de son ancienneté. Les visites de surveillance doivent être rapprochées dans les premières années de la maladie, idéalement au moins tous les 3 mois si la maladie est active puis tous les 6 mois en rémission.

LA RECTOCOLITE ULCÉRO-HÉMORRAGIQUE

La rectocolite hémorragique (RCH) se distingue de la maladie de Crohn par sa localisation exclusive au niveau du côlon. Ainsi l’intestin grêle n’est jamais atteint, elle touche toujours la partie basse du rectum et l’extension vers le haut est plus ou moins importante selon la forme de la maladie : atteinte isolée du rectum, du rectosigmoïde, du côlon gauche, du côlon transverse et parfois de la totalité du côlon (les médecins parlent de pancolite). L’étendue de la maladie est généralement assez constante.

Il s’agit d’une inflammation chronique dont l’évolution est entrecoupée de périodes de poussée et de rémissions pendant lesquelles la maladie peut rester totalement silencieuse en particulier sous l’efficacité des divers traitements. Plus de 80 % des patients ont une maladie récurrente.

Comme dans la maladie de Crohn, la RCH s’exprime par des signes digestifs et des signes non digestifs.

L’origine de la maladie est encore inconnue, bien que l’on ait pu identifier plusieurs facteurs impliqués dans la survenue de la maladie :

  • Facteur génétique avec une fréquence plus élevée chez les parents du 1er degré d’un malade.
  • Facteurs d’environnement : la RCH est retrouvée moins fréquemment chez les fumeurs (à l’inverse de la maladie de Crohn) et est particulièrement rare chez les sujets qui ont eu l’ablation de l’appendice.

Les manifestations digestives

Les symptômes associent des selles fréquentes, des émissions de glaires sanglantes, des faux besoins*, des douleurs abdominales.

L’intensité des symptômes est variable. Il existe des formes atténuées, modérées ou sévères de la maladie.

En effet, dans la forme légère de la RCH, heureusement la plus fréquente, le nombre de selles est réduit, les saignements rares.

Il n’y a pas de retentissement sur l’état général du patient, mais un retentissement sur sa qualité de vie que les traitements permettent de minimiser. À l’inverse, dans sa forme sévère, observée dans 15% des cas, la RCH est responsable d’une diarrhée profuse, avec altération de l’état général, apparition de fèvre, de douleurs abdominales et de tachycardie. Cette forme doit être prise en charge rapidement, souvent en hospitalisation.

Des symptômes d’intensité intermédiaire témoignent d’une forme modérée de RCH.

Les manifestations non digestives

À côté des symptômes intestinaux, il existe d’autres manifestations de la RCH. Elles sont semblables à celles observées dans la maladie de Crohn, avec toutefois une fréquence particulière de l’atteinte des voies biliaires.

Les complications de la RCH

Comme dans la maladie de Crohn, diverses complications peuvent émailler l’évolution de la RCH. Elles ne sont pas fréquentes.

En dehors des sténoses, aucune des complications n’excède 5 % des cas. La complication essentielle est la nécessité de recourir à un geste chirurgical sur le côlon lors d’une poussée devenue résistante aux traitements, ou secondaire à une destruction progressive de la paroi intestinale liée à une évolution prolongée sans traitement efficace.

L’objectif des traitements développés aujourd’hui est d’obtenir, là aussi, la « cicatrisation muqueuse » par un traitement adapté et bien surveillé pour éviter la survenue de ces complications.

La fibrose progressive de la paroi intestinale

Elle peut être responsable, après plusieurs années d’évolution, d’une diminution de calibre des organes, qui n’a pas nécessairement une expression clinique. Elle est souvent découverte de façon fortuite lors d’un examen radiologique ou endoscopique.

La dilatation aiguë (ou colectasie*) d’un segment de l’intestin

C’est une complication très rare (2% des cas), mais potentiellement grave, responsable de signes généraux (prostration, accélération du pouls, distension de l’abdomen).

Une simple radiographie d’abdomen sans préparation permet de faire le diagnostic en montrant la dilatation colique.

La prise d’opiacés peut favoriser cet accident. Traitée à temps, la dilatation aiguë du côlon évolue vers la guérison. En revanche, l’absence de traitement fait courir un risque élevé de perforation.

La perforation colique

C’est aussi une complication rare (3% des cas), mais sévère. Elle est responsable d’un tableau de péritonite aiguë, qui est une urgence chirurgicale.

Une hémorragie grave constitue un accident rare (3% des cas).

Il nécessite la mise en route immédiate d’une transfusion sanguine et parfois d’une intervention chirurgicale.

Les thromboses veineuses et artérielles

Comme dans la maladie de Crohn sont plus fréquentes en cas de poussée et peuvent être prévenues par un traitement anticoagulant préventif.

Enfiin, le risque de survenue d’un cancer du côlon ou du rectum.

Il est faible, à peine plus élevé que celui de la population générale.

Ainsi, le risque de cancer n’existe qu’après de très longues années d’évolution de la maladie.

Par exemple après 30 ans d’évolution d’une RCH, il n’est que trois fois plus élevé que dans le reste de la population.

C’est pourquoi les médecins proposent de pratiquer régulièrement une coloscopie* de dépistage chez les patients présentant une maladie ancienne.

L’examen endoscopique permet la pratique de biopsies* à la recherche de lésions « précancéreuses » parfaitement accessibles au traitement.

LES EXAMENS DE DIAGNOSTIC ET DE SURVEILLANCE

Le diagnostic initial des MICI repose sur un faisceau d’arguments cliniques, endoscopiques, radiologiques et histologiques.

Schématiquement, il existe 2 étapes dans le diagnostic d’une MICI :

  • Affirmer la MICI, essentiellement éliminer un diagnostic différentiel (colites infectieuses, ischémiques, médicamenteuses, autres maladies inflammatoires).
  • Différencier une RCH d’une Maladie de Crohn (MC).

Certains examens seront systématiques comme les examens de laboratoire et la coloscopie, d’autres seront fonction du type de la maladie, de sa localisation et de son évolution.

Les examens incontournables

Les examens de laboratoire

Les prélèvements sanguins ne permettent pas de faire le diagnostic, mais sont utiles pour éliminer une cause infectieuse ou parasitaire, confirmer le caractère organique des symptômes et mettre en évidence un phénomène inflammatoire.

Un bilan biologique « standard » comporte :

✔ un hémogramme avec Numération Formule Sanguine à la recherche d’une anémie (baisse de l’hémoglobine) et d’une hyperleucocytose (augmentation des globules blancs),

✔ une CRP (C reactive proteine) : paramètre biologique spécifique d’une inflammation augmentant proportionnellement à son intensité,

✔ une ferritinémie et un coefficient de saturation de la transferrine à la recherche d’une carence martiale,

✔ un bilan hépatique à la recherche de perturbations pouvant faire suspecter une Cholangite Sclérosante Primitive,

✔ un dosage de l’albumine, vitamine B12 et folates sériques pour évaluer l’état nutritionnel et rechercher d’éventuelles carences,

✔ des Coprocultures et examen parasitologique des selles selon la présentation clinique. En règle générale, l’examen des selles n’a pas d’intérêt pour le diagnostic de MICI. Il peut cependant être utile pour exclure une cause infectieuse de diarrhée chronique (parasitose, salmonellose, yersiniose et infection à clostridium difficile),

✔ un dosage des anticorps ASCA/ANCA (hors nomenclature) : peuvent aider à différencier RCH et maladie de Crohn. Ils sont peu réalisés en pratique.

La répétition des examens de laboratoire permet de juger de l’amélioration des anomalies biologiques initiales.

La surveillance biologique est nécessaire pour contrôler la bonne tolérance du traitement :

  • Une évaluation de la fonction rénale (créatinémie, recherche de protéinurie) est conseillée tous les 6 mois pour les patients sous aminosalicylés.
  • Une surveillance rapprochée de la NFS et du bilan hépatique est indiquée pour les patients sous Thiopurines (Imurel et Purinétol).

La calprotectine fécale

  • Il s’agit d’une protéine que l’on dose dans les selles, un biomarqueur qui permet de discriminer avec une bonne sensibilité et spécificité la présence de lésions muqueuses au niveau du tube digestif. Elle n’est pas spécifique pour les MICI et peut s’élever dans d’autres pathologies
  • Ce dosage est un outil simple et non invasif, utile pour discriminer une MICI d’un trouble fonctionnel intestinal. Il tient également une bonne place dans le suivi des patients qui ont une corrélation excellente avec l’activité endoscopique de la maladie. Il peut avoir également un caractère prédictif des poussées inflammatoires (suivi post-opératoire, décroissance thérapeutique).
  • Un test a également été développé pour être utilisé à domicile de façon autonome par le patient. Les résultats du test s’analysent au moyen d’une application Smartphone téléchargeable.

La coloscopie*

C’est l’examen clé. La coloscopie est réalisée sous une courte anesthésie générale et consiste à introduire par voie rectale un endoscope qui permet à l’opérateur de voir l’intégralité du côlon et la dernière anse de l’intestin grêle (iléon). La veille de l’exploration, le patient ingère une préparation qui lui permettra de vider son intestin avant l’examen. Elle sera réalisée systématiquement, car elle permet d’établir le diagnostic positif, de préciser l’étendue de la maladie, sa sévérité (ulcérations +/- profondes, sténose).

La pratique de biopsies puis l’examen au microscope sont essentiels au diagnostic, notamment pour différencier entre elles les maladies inflammatoires et écarter des diagnostics différentiels comme une infection bactérienne ou virale.

  • La RCH touche exclusivement le rectum et le côlon. L’intégralité de la muqueuse malade est le siège de lésions, sans intervalle de muqueuse saine. On observe une atteinte continue avec une muqueuse rouge, granitée, fragile, saignant au contact avec des micro-ulcérations et du pus.
  • L’aspect évocateur d’une maladie de Crohn est une atteinte discontinue, multi segmentaire avec des ulcérations aphtoïdes, en rails ou en carte de géographie. L’examen peut révéler des rétrécissements de la lumière (sténose) ou une fistule notamment de la région ano-périnéale.
    L’ensemble du tube digestif peut être concerné.
    Il est donc nécessaire de réaliser une endoscopie œsogastroduodénale (gastroscopie) même en l’absence de symptômes cliniques gastriques.

Il peut arriver que la distinction entre une RCH et une Maladie de Crohn soit difficile à faire, et qu’une maladie inflammatoire étiquetée « RCH » se révèle être une authentique maladie de Crohn après un certain temps d’évolution, ou que le doute persiste. On parle alors de colite inclassée.

En dehors des poussées, la muqueuse est souvent normale ou cicatricielle, atrophique.

Une surveillance endoscopique régulière est nécessaire après quelques années d’évolution afin de dépister des lésions dysplasiques et ainsi prévenir l’apparition d’un cancer colorectal.

Les autres examens radiologiques

La radiologie conventionnelle est utile pour le diagnostic et l’évaluation de la longueur des segments atteints, pour le bilan d’extension en amont des lésions sténosantes et en cas d’échec de l’endoscopie.

Le diagnostic des complications abdominales reste essentiellement du domaine de l’échographie et surtout du scanner, pour la recherche d’abcès et d’occlusions intestinales. Ils seront prescrits en fonction du type de la maladie (maladie de Crohn ou RCH), de sa localisation, de son évolution de sa sévérité.

L’échographie* abdominale haute résolution

L’échographie haute résolution est particulièrement intéressante pour le suivi des patients avec une atteinte iléale. Cet examen est très opérateur dépendant. Toutefois, l’utilisation de sondes modernes de haute fréquence a permis de rendre cet examen performant pour la recherche de complications comme les abcès, fistules et phlegmons. Le caractère non irradiant de l’examen et son accessibilité permettent de le répéter régulièrement au cours du suivi et de suivre l’évolution de la maladie.

Le scanner* et entéroscanner

Il permet, par un procédé utilisant des rayons X, une étude fine de l’ensemble de la cavité abdominale à la recherche de fistule, d’abcès et est indispensable au cours des formes sévères. On peut être amené à injecter un produit de contraste ou à faire absorber un produit de contraste afin d’obtenir une distension des anses de l’intestin grêle facilitant l’analyse de la paroi digestive (on parle alors d’entéroscanner). Une administration préalable de 2 litres d’eau est donc nécessaire parfois à l’aide d’une sonde naso-jéjunale et un remplissage intestinal par entéroclyseur. Il permet de mieux mettre en évidence les anomalies endoluminales et pariétales .

L’imagerie par résonance magnétique nucléaire* (IRM) entéro IRM et IRM pelvienne

L’IRM permet d’obtenir des images numériques des différents organes. Contrairement au scanner, elle utilise des champs magnétiques à la place des rayons X. Elle est très utile dans le bilan pré-thérapeutique des fistules de la maladie de Crohn et tend à supplanter l’échoendoscopie.

L’IRM pelvienne est l’examen d’imagerie de référence en cas de LAP (Lésions Ano Périnéales) .

L’entéro-IRM comme pour le scanner la technique utilise soit la pose d’une sonde nasojéjunale ou l’ingestion orale d’un agent de contraste iso-osmolaire (Mannitol). Elle permet une meilleure visualisation des ulcérations et des trajets fistuleux. Il s’agit de la technique la plus performante pour caractériser une sténose du grêle.

Elle a l’avantage d’être non irradiante et sera privilégiée pour le bilan initial et le suivi de la maladie de Crohn intestinale.

L’échoendoscopie*

C’est une échographie réalisée à l’aide d’un endoscope muni d’une sonde d’échographie fixée à son extrémité. Elle est surtout utilisée, au cours des MICI, par voie basse pour explorer le rectum et le périnée. On peut préférer une sonde rigide introduite à l’aveugle dans le rectum, on parle d’endosonographie. Cet examen est surtout indiqué dans la maladie de Crohn pour la recherche d’abcès ou de fistules périnéales.

L’entéroscopie

Cet examen endoscopique nécessitant des appareils plus longs, et permettant l’exploration de l’intestin grêle, reste de réalisation peu répandue. Il offre des possibilités d’exploration de maladie de Crohn avec atteintes suspendues sur le grêle.

La coloscopie virtuelle

C’est une nouvelle technique d’imagerie du côlon. Fortement médiatisée, elle suscite de manière légitime l’intérêt des patients et des médecins. Il s’agit d’une exploration par scanner* hélicoïdal, avec reconstruction tridimensionnelle informatisée des coupes. Dans l’avenir, l’imagerie par résonance magnétique pourrait se substituer au scanner* (colo IRM).

L’intérêt de cette exploration résulte de son caractère peu invasif. Toutefois à ce jour sa validité, sa reproductibilité, sa sensibilité au diagnostic et son impact économique restent inconnus. Au cours des MICI, elle ne semble pas pouvoir remplacer la coloscopie, car la visualisation des lésions de la paroi colique est moins bonne et elle ne permet pas les biopsies indispensables tant pour le diagnostic que pour le dépistage des lésions précancéreuses.

La Vidéo-capsule

L’examen consiste à faire ingérer au patient une gélule contenant une caméra vidéo miniaturisée et une source lumineuse. Elle est capable de prendre de 2 à 8 images par seconde et de les envoyer par ondes radio vers des capteurs cutanés reliés à un boîtier-enregistreur.

Elle permet d’explorer l’intestin grêle en totalité sans toutefois permettre l’obtention d’échantillons tissulaires. Elle est contre-indiquée en cas de sténose et demande donc d’écarter préalablement l’existence d’un rétrécissement de l’intestin dans lequel la capsule (11mm) pourrait se bloquer.

Cet examen est indiqué pour confirmer la suspicion de maladie de Crohn atteignant exclusivement l’intestin grêle. Des essais sont actuellement en cours avec une vidéocapsule qui permettrait l’exploration du côlon, la place de cet examen dans la surveillance des MICI reste à préciser.

À RETENIR

L’ensemble de ces explorations permet de calculer le niveau d’activité de la maladie qui participe, avec les paramètres cliniques et biologiques, à l’élaboration d’un score de gravité, utile à l’adaptation du traitement.

Ainsi, le bilan permet de poser le diagnostic de MICI, et de différencier RCH et maladie de Crohn. Toutefois, il peut arriver que cette distinction soit difficile à faire, et qu’une maladie inflammatoire étiquetée « RCH » se révèle être une authentique maladie de Crohn après un certain temps d’évolution, ou que les doutes persistent et on parle alors de colite inclassée.