Historique des MICI

Vous lirez le plus souvent : Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin, plus rarement Maladies inflammatoires « cryptogénétiques » (étymologiquement de cause inconnue) de l’Intestin.

L’imprécision de ces termes révèle les limites de nos connaissances actuelles. Cela explique l’engouement des chercheurs qui, heureusement, commencent à comprendre leurs mécanismes et donc à nous proposer des traitements plus adaptés.

Le concept de MICI, c’est déjà plus d’un siècle de recherche, d’échecs parfois, d’efforts déçus, d’hypothèses incertaines. Il individualise essentiellement deux maladies :

  • La RCH : Rectocolite Hémorragique (Ulcerative Colitis de nos amis anglo-saxons).
  • La MC : Maladie de Crohn (Crohn’s Disease), les médecins aimant bien laisser leur nom à leur « maladie ».

Des descriptions sommaires, mais douteuses de maladies inflammatoires de l’intestin sont déjà données dans les textes anciens (Arrétée de Cappadoce…). Plus structurés, et malheureusement oubliés des historiens sont les écrits d’Abercrombie, médecin écossais réputé en son temps. Celui-ci consacre dans son ouvrage, édité en 1837, plus de 80 pages « Aux affections inflammatoires de la membrane muqueuse du canal intestinal ». Il y décrit déjà, sur des comptes-rendus d’autopsies, les lésions retrouvées dans la MC et de la RCH, mais il ne propose pas un cadre syndromique. Ce que fait Samuel Wilks en 1859.

Voilà donc une maladie, ou plutôt deux et peut être même plus, reconnues depuis plus d’un siècle… et toujours mal connues. Wilks et Morson en 1875 décrivent bien les aspects anatomocliniques de la RCH, et proposent l’appellation (ulcerative colitis ou UC), et Hale White en détermine le cadre nosologique en 1895.

Quant à la MC, si Mosschowitz et Wilensky, en 1923 et 1927, furent les premiers à parler de « granulome* non spécifique de l’intestin grêle*», la paternité de cette maladie revient en 1932 à Crohn et ses collaborateurs Ginsburg, Oppenheimer et Berg du Mount Sinaï Hospital (New York), qui rapportèrent 14 cas « d’iléite terminale ». Mais malheureusement « l’histoire » est une fois de plus injuste, car en y regardant de plus près, et c’est souvent le cas en médecine, la maladie de Crohn avait déjà été décrite. En effet 19 ans auparavant Sir T. Kennedy Dalziel, dans le British Medical Journal, décrivait l’iléite terminale.

Plus tard Lockhart-Mammery, Bussel, Morson… montreront que la MC ne se localise pas uniquement à l’iléon* (partie terminale de l’intestin grêle), mais peut toucher le côlon, l’anus, le périnée, l’œsophage…

Toujours est-il que de nombreux débats ont opposé ceux qui pensaient que ces deux maladies sont deux formes différentes d’une même maladie, à ceux qui les séparent formellement (ce qui est actuellement la théorie la plus admise). Il est clair qu’à ce jour le cadre des MICl n’est pas parfaitement précis. Toutes les recherches faites tendent à corroborer l’hypothèse qu’il s’agit de maladies dites « multifactorielles », faisant intervenir probablement :

  • une « prédisposition génétique*»,
  • des causes immunologiques, où le corps s’autoattaque, comme dans une sorte de désapprobation du « soi » ou de « non-reconnaissance »,
  • des causes infectieuses,
  • des facteurs environnementaux(mode de vie, alimentation, tabac pour la maladie de Crohn…),
  • des perturbations des mécanismes de l’inflammation,etc…

Tout cela est complexe, mais passionne les chercheurs actuellement. Il est certain que les progrès sont réels, car l’on ne vit pas « trop mal » avec ces maladies qui pouvaient tuer facilement, dans leurs formes graves, il y a seulement 30 ans.

À ce jour, il n’existe pas de traitement susceptible de guérir la maladie. Il existe néanmoins des traitements permettant de diminuer l’intensité et la durée des poussées, de prévenir les récidives et de diminuer le recours à la chirurgie.

La prise en charge thérapeutique a notamment beaucoup évolué ces dernières années. Aux aminosalicylés et aux corticoïdes classiquement utilisés, ont été progressivement introduits en première ligne les immunosuppresseurs (ex. azathioprine et le méthotrexate). Depuis les années 1998 les traitements biologiques voir les anti-TNFα (l’infliximab, l’adalimumab puis le golimumab) sont venus renforcer la panoplie des médicaments et ont révolutionné la prise en charge des MICI.

Plus récemment en 2014, de nouvelles biothérapies, les anti intégrines α4-β7 (le védolizumab) et en 2016 les anti interleukine IL12/23 (l’ustekinumab) ont renforcé l’arsenal thérapeutique.

Des portes s’ouvrent dans la compréhension des mécanismes de ces maladies, en espérant qu’un phénotypage et un génotypage pourront permettre d’adapter le traitement à chaque cas en particulier.