Diagnostic et traitement de la rectite réfractaire

Epidémiologie de la rectite réfractaire

  • Près de 50 % des patients avec RCH ont une atteinte limitée au rectum. Parmi ces rectites isolées, 10 % vont évoluer vers une forme réfractaire
  • Il s’agit d’une entité à part entière à différencier des formes basses (en principe jusqu’à l’angle gauche)
  • Il n’y a pas de risque accru de cancer colorectal

Diagnostic de la rectite réfractaire

En pratique, le caractère rebelle de la rectite se pose après une première période de traitement s’accompa­gnant d’une situation d’échec.

La rectite est dite réfractaire si une rémission ou une amélioration n’est pas obtenue après deux mois de 5 ASA local, éventuellement associé à un traitement par 5 ASA oraux, et un mois de stéroïde local.

Pour affirmer le caractère réfractaire, il convient d’évaluer l’observance du traitement et d’éliminer les autres causes de rectite.

Le délai du diagnostic (3 mois) peut être raccourci en cas de critères de gravité ou de formes actives (récidive immédiate à l’arrêt du traitement).

Diagnostic différentiel de la rectite réfractaire

  • Contexte particulier (irradiation, notion d’épidémie)
  • Iatrogène (prise d’AINS)
  • Clostridium difficile à rechercher par un examen des selles (hospitalisation, prise d’antibiotiques)
  • Colite à CMV (cf. fiche MICI Mémo Infection à CMV)
  • Herpès virus (sujets homosexuels ou positifs pour le VIH)
  • Syndrome du prolapsus muqueux (lésions dans le cadran antérieur)
  • Syndrome de l’intestin irritable

Observance du traitement de première ligne

Pour les maladies inflammatoires, l’observance du traitement est de 40 à 70 %. Dans le cas des rectites
réfractaires, ce défaut d’observance peut faire passer une rectite « mal traitée » pour une rectite réfractaire,
d’où l’intérêt de la relation médecin/patient pour obtenir une adhésion au traitement.

Les facteurs de mauvaise observance sont :

  • le caractère récent du diagnostic
  • la non­mise en rémission
  • une activité professionnelle soutenue temps plein
  • un traitement par voie rectale plutôt que per os
  • un âge de moins de 40 ans

Observance du traitement de première ligne

En première intention, dans les poussées minimes à modérées, on utilise un traitement par un amino-salicylé sous la forme d’un suppositoire à la dose de 1 gramme par jour pendant 14 à 28 jours (grade B)

En cas de non réponse ou d’amélioration nette, une rectite réfractaire peut être évoquée. Il est donc
fondamental d’optimiser ce traitement de première ligne et de ne l’abandonner qu’après échec avéré.

Comment optimiser son traitement en ligne :

  • Augmenter la dose de salicylé par voie rectale mais la dose optimale est de 1 gramme/j et il n’y a pas de
    bénéfice démontré d’une augmentation de dose
  • Passer à la forme lavement du 5 ASA en cas d’atteinte au­delà de la charnière
  • Associer un 5 ASA per os à la dose thérapeutique habituelle
  • Associer un laxatif de lest devant une constipation d’amont
  • Associer un corticoïde par voie rectale (lavements ou mousse)
  • Combinaison de produits (5 ASA et corticoïdes) et galéniques (suppositoire, mousse et per os)

Traitement de la rectite réfractaire

  • La corticothérapie orale  
    • surtout si signes de gravité (anémie < 10,5 g/dl, fièvre, tachycardie, plus de 6 évacuations par jour)
    • dose de 0,8 à 1 mg/kg/j
       
  • Les thiopurines  
    • à un an, 65 % des patients sont en rémission sans corticoïdes
    • problème du long délai d’action
    • azathioprine 1,5 à 2,5 mg/kg et la 6­mercaptopurine à 1,5 mg/kg
       
  • Les biothérapies  
    • l’infliximab à la dose de 5 mg/kg en induction (S0, S2 et S6) puis en entretien (toutes les 8 semaines) : rémission 38 % à 8 sem.
    • l’adalimumab (160/80 mg en induction) puis 40 mg toutes les 2 semaines pour les formes résistantes à l’infliximab
       
  • La chirurgie  
    • ultime recours surtout dans les dégradations de la qualité de vie et en présence d’une microrectie, source de persistance des symptômes
    • coloprotectomie avec anastomose iléo­anale
       
  • Certains traitements pourront se discuter avant d’arriver à la chirurgie (le niveau de preuve reste faible)  
    • patch de nicotine (15 mg) associé aux 5 ASA
    • lavements de ciclosporine (250 mg)
    • lavements de tacrolimus
       

Conclusion

Le pronostic vital est très rarement engagé mais le handicap fonctionnel est souvent majeur.

Il convient de respecter les critères diagnostiques (durée de traitement, observance, diagnostic différentiel).

Le caractère réfractaire justifie une stratégie d’escalade thérapeutique avec l’intérêt croissant des biothérapies. La chirurgie reste exceptionnelle mais représente l’ultime recours.

Proposition de schéma de prise en charge

Proposition de schéma de prise en charge

Références

  1. Godeberge P. La rectite réfractaire. Post’U 2010:1­8.
  2. Seksik P et al. The treatment of distal ulcerative colitis. Gastroenterol Clin Biol 2004;28:964­73.
  3. Marteau P et al. Recommendations for clinical practice for the treatment of ulcerative colitis. Gastroenterol Clin Biol 2004;28:955­60.
  4. Godeberge P. Prise en charge thérapeutique des proctites. Gastroenterol Clin Biol 2004;28:D70­D74.