NOUVELLES VOIES THERAPEUTIQUES DANS LES MICI
L’objectif des nouvelles thérapeutiques proposées dans les MICI est double :
- améliorer la tolérance des traitements, les médicaments disponibles les plus actifs (corticoïdes, azathioprine) étant à l’origine d’effets secondaires, rarement graves, mais assez souvent gênants ;
- permettre le contrôle de certaines formes de la maladie, encore mal maîtrisées par les thérapeutiques actuelles : poussées sévères résistant aux corticoïdes, formes chroniques actives ne répondant pas à l’azathioprine, lésions anopérinéales sévères.
Les nouveaux corticoïdes à effet topique administrés par voie orale sont essentiellement représentés par le budésonide, dont la mise sur le marché devrait intervenir prochainement. La forme CIR, élaborée par Astra est destinée à traiter les lésions iléocoliques droites de maladie de Crohn.(MC). Pour contrôler les poussées, elle a fait preuve d’une efficacité supérieure à celle du 5-ASA oral (4g/j) ou du placebo, et comparable à celle de 40 mg de prednisolone, le taux de rémission étant d’environ 60% après 8 semaines. A la posologie de 9 mg/jour, les effets secondaires sont nettement moins fréquents qu’avec les corticoïdes classiques. Une étude récente a montré que le budésonide (6 mg/j) pouvait permettre le sevrage de prednisolone chez des malades corticodépendants. En revanche, le rôle du budésonide pour maintenir une rémission induite des traitements médicamenteux ou après une résection chirurgicale semble faible ou nul.
Les immunosuppresseurs sont utilisés de façon de plus en plus larges dans les MICI. L’azathioprine reste le médicament de référence, mais son délai d’action de quelques mois est un problème dans les formes très actives. L’utilisation d’une dose de charge IV initiale n’est pas dénuée de risque, et une étude récente indique que ce mode d’administration ne raccourcit pas le délai d’action, comparée à l’administration orale. Chez les malades qui ne répondent pas à l’azathioprine à la dose habituelle (2-2,5 mg/kg/j), l’augmentation de dose peut être efficace. Un ajustement de la posologie aux taux de 6-thioguanines érythrocytaires (métabolites actifs du médicament) pourrait être utilisé. Le remplacement par la 6-mercaptopurine (1,5 mg/kg) peut aussi être tentée en cas d’intolérance à l’azathioprine, sauf en cas de pancréatite aiguë. Lorsqu’un accident hématologique sévère survient, un déficit en activité thiopurine méthyltransférase doit être recherché. Le méthotrexate est une alternative possible en cas d’échec ou d’intolérance, mais ses résultats à long terme semblent moins favorables. Dans les poussées sévères, corticorésistantes de RCH ou de MC, et dans certaines complications (pyoderma, lésions anopérinéales) la ciclosporine par voie intraveineuse trouve peu à peu sa place. Dans des cas bien sélectionnés, ce traitement peu être tenté pendant une période quelques jours, sous surveillance stricte, avant d’envisager la chirurgie. Un relais par une immunosuppresseur d’action retardée (azathioprine) doit ensuite être introduit car les rechutes sont fréquentes. D’autres immunosuppresseurs sont actuellement à l’essai, avec déjà quelques résultats préliminaires : mycophénolate mofétil et tacrolimus. Un essai comparatif récent indique que le mycophénolate mofétil est aussi efficace que l’azathioprine, avec un effet apparemment plus rapide. Ce résultat favorable n’est toutefois pas reproduit dans d’autres études non contrôlées.
Les progrès thérapeutiques suivent de près les progrès physiopathologiques réalisés dans la compréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires intervenant dans la réponse immunitaire et l’inflammation. Ainsi, le rôle de la “voie Th1”, impliquant l’interféron g et l’IL-2, puis la production par les macrophages de TNFa et IL-1 semble prédominer dans la MC, du moins au stade des lésions chroniques. Deux essais contrôlés ont montré l’efficacité d’anticorps anti-TNF dans des formes réfractaires de MC. La répétition des injections d’anticorps semble possible, au moins sur quelques mois, avec une conservation de l’efficacité. L’efficacité à plus long terme (notamment en cas de nouvelles injections faites à distance d’un premier traitement) et les risques de ce traitement très coûteux restent cependant à mieux évaluer. La thalidomide possède également des propriétés anti-TNF : des essais préliminaires suggèrent une efficacité dans les MICI, notamment dans les lésions anopérinéales.
L’interleukine-10 est une cytokine immunomodulatrice qui inhibe la voie Th1. Les premiers essais dans les MICI d’injections sous cutanées d’IL-10 indiquent une efficacité modérée dans des poussées d’intensité modérée ou dans des formes chroniques actives de MICI. Ce traitement s’est avéré inefficace pour prévenir les rechutes endoscopiques postopératoires dans la MC.
Des premières études avec un oligonucléotide anti-sens anti-ICAM-1 (molécule d’adhésion impliquée dans le recrutement des polynucléaires), avec des anticorps anti-intégrine a-4 ou avec l’interleukine-11 ont également été rapportés récemment.