Un défaut d’utilisation de l’acide butyrique (AB) pourrait intervenir dans la physiopathologie de la RCH. Ce défaut n’est pas secondaire aux lésions car il persiste en rémission. G. Gorbatchef et col. (1) (Lyon) ont montré qu’in vivo l’absorption et l’oxydation de l’AB dans le colonocyte ne sont pas réduites. L’AB pourrait être un puissant inhibiteur de la production de cytokines, en effet, pour P. Chevassus et col. (2) (Lyon) chez des sujets sains , l’AB supprime la libération stimulée de cytokines et inhibe de façon dose dépendante la libération des cytokines inflammatoires, plus efficacement que le pentoxifylline, un inhibiteur connu de la production des cytokines. Ces travaux pourraient expliquer le rôle pathogène de la carence en acide butyrique dans la pathogénie de la RCH et le rôle parfois bénéfique des lavements d’acide butyrique chez les patients en réduisant la libération de TNFalpha, d’IL8 et de TGFß .
JM Reimund et col. (3) (Strasbourg) ont montré qu’in vitro deux dicatéchols (l’acide nordihydroguiairétique (NDGA) et son dérivé le roopérol) inhibent la production de TNFalpha et d’IL 6 et 8 par des cellules mononuclées sanguines de témoins sains et de patients atteints de MICI et par la muqueuse intestinale recueillie par biopsies endoscopiques. Ce type d’antioxydant pourrait ainsi constituer dans l’avenir un outil thérapeutique.
La comparaison de maladies de Crohn (MC) avec ou sans sténose a permis à P. Chamouard et col. (4) (Strasbourg) de mettre en évidence un taux sérique de TGFß1 (cytokine impliquée dans les phénomènes de réparation tissulaire) significativement plus bas chez les MC avec sténose. L’IL10 pourrait peut-être être proposée dans le traitement des pochites secondaires à une coloproctectomie totale pour RCH avec anastomose iléoanale. Un déséquilibre entre IL8, cytokine pro inflammatoire et l’IL10 (cytokine anti-inflammatoire) a été décrite chez 18 RCH par P. Bulois et col. (5) (Lille). M Pagenault et col. (6) (Rennes) ont rapporté les premiers résultats issus du registre ABERMAD visant à déterminer l’incidence et les principales caractéristiques des MICI en Bretagne. Cent trente neuf gastro-entérologues des 4 départements bretons (2 827 518 habitants) ont participé à l’établissement de ce registre. En Bretagne, l’incidence des MICI est égale à 6,2 pour 100 000 habitants. L’incidence de la RCH est plus faible que celle de la MC. L’incidence et les caractéristiques des MICI sont restées semblables pendant les 4 années du recueil, à l’exception de l’incidence des cas de RCH qui a diminué. Les formes conjugales (FC) de MICI sont classiquement rares pourtant, grâce au registre EPIMAD et à la collaboration de trois centres hospitaliers de référence en Belgique, JF Colombel (7) (Lille) a rapporté 28 FC de MICI : 15 dans le Nord-Ouest de la France et 13 en Belgique. Il est a noter que dans 21 cas la MICI apparaissait après le début de la vie commune (les deux conjoints n’étant pas atteint auparavant), le premier conjoint étant malade 8 ans après le début de la vie commune, le second étant touché 8 ans plus tard. La fréquence élevée de FC dans le Nord-Ouest de la France et en Belgique est en faveur d’un rôle étiologique des facteurs environnementaux dans les MICI. Le risque de MICI dans la descendance fait apparaître 7 cas de MICI chez 48 enfants, ce qui représente 7/26 descendants de plus de 22 ans (il s’agissait de MC dans tous les cas, quelque soit la MICI des parents). N. Massot et col. (8) (Paris) ont montré que l’arrêt du tabac modifie l’évolution de la RCH en nécessitant plus d’hospitalisation, davantage de corticothérapie mais sans augmenter le risque chirurgical. Dans une étude multivariée A. Uzan et col (9) (Reims) confirment que dans une population française, l’appendicectomie à un effet protecteur sur la survenue ultérieure d’une RCH. Cent soixante dix sept maladies de Crohn (MC) (88 H/89 F) ont pu être étudiées sur une période de 20 ans par I Etienney et col (10) (Paris). Après plus de 20 ans d’évolution, les malades se répartissent en 1/4 de formes actives, 1/4 de formes en rémission sans traitement et 1/2 de formes en rémission sous traitement médical. Le taux cumulé d’intervention chirurgicale était de 82 %. Un adénocarcinome iléal ou colique est survenu dans 6 (3,4 %) cas, et une thrombose veineuse dans 15 (8,6 %) cas. Dix pour cent des patients sont décédés d’une cause liée à la MC.
L’endoscopie permet d’évaluer fidèlement l’état de la paroi colique au cours des poussées de MC colique. Trois critères endoscopiques de gravité (CEG) ont été retenus par S Nahon et col. (11) (Paris) : 1) ulcérations profondes atteignant la musculeuse 2) ulcérations profondes étendues sur plus d’un tiers de la surface d’un segment colique mais n’atteignant pas la musculeuse 3) décollements muqueux associés ou non à des ulcérations en puits. En comparant ces critères endoscopiques aux données chirurgicales recueillies chez 78 malades opérés entre 1982 et 1996 pour une MC colique résistante au traitement médical, la profondeur et la superficie des ulcérations appréciées par la coloscopie étaient corrélées à celles observées sur les pièces de colectomie (r = 0,69 et r = 0,68 ; P < 0,001 respectivement). En cas de suspicion de colite aiguë grave (CAG) compliquant une MC colique, la coloscopie, réalisée par un opérateur expérimenté, est dénuée de risque. Lorsqu’elle montre des CEG, elle prédit avec une très forte probabilité la gravité anatomique de la colite. Inversement, lorsqu’elle n’en retrouve aucun, elle permet quasiment d’exclure le diagnostic de CAG. PJ Valette (Lyon), a montré que, entre des mains entraînées, l’échographie transpariétale à l’aide d’une sonde de 7 à 10 Mhz permet d’obtenir des informations intéressantes en particulier dans la MC avec une sensibilité et une spécificité respectivement de 85 % et de 90 %.
Dans une étude prospective portant sur 39 MC, C Offner-Mateo et col. (12) ont noté que 3/4 des MC développent une ostéonécrose de la tête fémorale (ONTF) (diagnostiquée par IRM) un seul patient était symptomatique, un n’avait pas reçu de corticoïde ce qui pose la question de facteurs propres à la MC pouvant favoriser l’ONTF. A Bourreille et col. (13) (Rennes) ont mesuré, en prospectif, la prévalence et recherché des facteurs cliniques et biologiques associés à l’ostéopénie chez 43 MICI de patients atteints de MICI. Un quart des patients atteints de MICI hospitalisés ont une déminéralisation osseuse grave les exposant à des complications fracturaires, la déminéralisation osseuse est associée à l’état nutritionnel, à l’inflammation et à la dose cumulée de corticoïdes reçue précédemment. Ces travaux montrent l’utilité probable (mais à démontrer) d’une adaptation du traitement (réduction de la corticothérapie et/ou supplémentation vitaminiques ou calcique).
La comparaison de 11 MICI ayant un antécédent thrombotique à 43 MICI sans antécédent thrombotique par C. Guédon et col (14) (Rouen) révèle que lors des poussées de MICI, la fréquence accrue des accidents thrombotiques serait liée à des mutations significativement plus fréquentes des facteurs II et V Leiden conjuguée à l’état d’inflammation tandis que les déficits en protéines C, S en antithrombine III et la présence d’anticorps antiphospholipides auraient un rôle moindre L’étude de la fonction surrénalienne par test au synacthène immédiat (TSI) à l’arrêt d’une corticothérapie (dose à l’arrêt inférieur à 10 mg/j) a permis à Desrame et col. (15) (Paris) de montrer que 58 % des MICI ont un TSI anormal. Ceci conduit les auteurs à préconiser un TSI systématique avant l’arrêt de toute corticothérapie (il reste à démontrer que, en l’absence de stress, une opothérapie substitutive est utile chez des patients asymptomatiques).