En ce qui concerne les MICI, cette nouvelle DDW aura été un excellent cru alliant symposium, mises au point, controverses et publications originales rendant une synthèse exhaustive délicate. L’IRM est manifestement un nouvel outil qui prend une place essentielle dans la démarche diagnostique. Roznowski et col. (Berlin) montrent que si l’IRM ne peut remplacer la coloscopie dans le diagnostic des MICI, elle permet d’évaluer l’activité de la maladie, de préciser la présence de localisations extra-intestinales, de visualiser fistules et abcès. L’étude réalisée par G Van Assche et col. (Louvain) montre par ailleurs, qu’après traitement par infliximab (INF), si les fistules se ferment, les trajets fistuleux persistent à un degré variable et pourraient être la cause des rechutes.
Des kits sont actuellement commercialisés aux USA pour détecter les anticorps anti-Saccharomydes cerevisiae (ASCA) et les anticorps anti-cytoplasme de polynucléaires (pANCA) susceptibles de différencier maladie de Crohn (MC) et RCH. Toutefois la valeur discriminante de ce test sérologique n’est pas optimale. Plusieurs équipes (S Vermeire et col. Louvain, E Oh et col. Los Angeles) ont montré que la recherche simultanée d’anticorps dirigés contre la membrane externe de E. coli (anti-OmpC) améliore de 10 % la sensibilité diagnostique mais au détriment de la spécificité. La prévention du cancer colique au cours des MICI passe par la détection des dysplasies. Pour Ch Berstein (Winnipeg), si un dépistage de la dysplasie doit être réalisé, il doit être rigoureux sinon toute surveillance est inutile, 4 biopsies, sur au moins 8 sites différents, doivent être pratiquées qu’il existe ou non des anomalies macroscopiques. Dix pour cent des RCH ou des MC coliques ont une dysplasie ou un cancer lors de la première coloscopie de dépistage. Cette première coloscopie doit être réalisée pour BA Lashner (Cleveland) après 8 ans d’évolution en cas de pancolite, 15 ans en cas de colite gauche. Jusqu’à la 20ème année d’évolution, la surveillance doit se faire tous les 3 ans, tous les 2 ans les 10 années suivantes, puis ultérieurement tous les ans. En cas de cholangite sclérosante, le risque de cancer est important, le dépistage doit se faire tous les ans. La découverte d’une dysplasie de haut grade (DHG) est l’indication formelle d’une colectomie. En cas de dysplasie de bas grade (DBG), après de vifs débats, un certain consensus semble se faire vers l’indication d’une colectomie si la DBG est confirmée par 2 anatomo-pathologistes experts car elle est associée à un cancer dans 19 % des cas et évolue dans 35 à 50 % des cas vers une DHG ou un cancer.
La prévention des rechutes post-opératoires de la MC a fait l’objet de discussions intenses. Pour WJ Tremaine (Rochester), les traitements médicaux n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, ils sont coûteux (5-ASA : 2574 $/an, azathioprine : 1210 $/an), non dénués d’effets secondaires, et la compliance des MC est mauvaise. RS McLeod (Toronto), ne récuse pas la prévention. Pour elle, l’avis du patient est primordial, il convient de lui présenter les avantages, les inconvénients, les incertitudes et dans tous les cas, le traitement proposé doit être celui qui induit le moins d’effets secondaires. P Rutgeerts (Louvain) adopte une attitude plus nuancée en distinguant les MC à fort risque de récidive post-opératoire (forte évolutivité avant l’intervention, formes pénétrantes, localisation du grêle, patients jeunes, tabagisme) chez qui la poursuite ou la mise en route d’un traitement immunosuppresseur est indispensable, des MC à faible risque. Chez ces dernières, aucun traitement n’est prescrit, par contre une endoscopie est réalisée à 6 mois. En l’absence de récidive endoscopique, l’abstention thérapeutique est de mise. En cas de récidive modérée et peu étendue un traitement par 5-ASA (4 g/j) est proposé, en cas de récidive plus sévère un traitement par azathioprine est institué en association pendant 3 mois à de l’ornidazole.
L’événement essentiel en ce qui concerne les MICI aura été la présentation par S Hanauer et col. (Chicago) des résultats préliminaires à 30 semaine de l’essai ACCENT 1 (durée totale : 54 semaines) visant à comparer l’efficacité d’une dose unique d’infliximab (INF) à celle de 3 doses suivies d’un traitement d’entretien chez 573 maladies de Crohn (MC) modérées à sévères (CDAI médian : 297). Tous les patients ont reçu une dose initiale de 5 mg/kg d’INF. A la 2ème semaine (S2), 335/573 (58,5 %) étaient en rémission clinique. Ces 335 MC ont été randomisées pour recevoir à S2, S6 puis toutes les 8 semaines, soit un placebo (Gr I), soit 5 mg/kg d’INF (Gr II) soit 5 mg/kg d’INF à S2 et S6 puis 10 mg/kg d’INF toutes les 8 semaines. A S30, une rémission clinique persiste chez respectivement 21, 39 et 45 % des MC des Gr I, Gr II et Gr III, une rémission clinique avec sevrage en corticoïdes est obtenue chez respectivement 11, 31 et 37 % des MC des Gr I, Gr II et Gr III. A S30, la dose médiane quotidienne de corticoïdes est respectivement de 10 mg, 0 mg et 0 mg dans les Gr I, Gr II et Gr III. La tolérance du traitement a été équivalente dans les 3 groupes, à signaler toutefois la survenue de 3 cancers (un cutané dans le Gr I et un cutané et un rénal dans le Gr II).
Des anticorps anti-chimériques (HACA) s’observent chez 13 à 18 % des MC traitées par INF. RJ Farrell et col. (Boston) ont montré qu’il existe une forte corrélation entre l’apparition d’HACA et la perte de la réponse initiale, les réponses partielles, l’absence de réponse et les réactions aux perfusions lors des retraitements par INF. L’analyse des 58 grossesses survenues chez des patientes ayant reçu de l’INF avant et/ou pendant la grossesse montre que l’incidence des fausses couches, de la prématurité est comparable à celle d’une population témoin (JA Katz et col. Cleveland). Le coût direct annuel des maladies inflammatoires a été évalué par PS Babu et col. (Leeds) : il s’élève à 1644$ pour la RCH et 3276 $ pour la MC, dont respectivement pour la RCH et la MC 44,4 et 29,4 % pour les dépenses pharmaceutiques, 23,5 et 15,4 % pour les examens complémentaires, 19,1 et 12,2 % pour les consultations et 13 et 43 % pour l’hospitalisation. P Rugeerts (Louvain) a rappelé que si le coût de l’INF est élevé, il permet de réduire le coût annuel de la MC de 1227 $/an en réduisant essentiellement les frais d’hospitalisation.
Parmi ce qui sera peut-être les médicaments des MICI dans les années à venir, il faut signaler des études pilotes :
- Le récepteur soluble p55 du TNF (TBP-1) qui neutralise le TNF, dépourvu d’immunogénicité, s’avère, à la dose de 50 mg par voie sous cutanée 3 fois semaine pendant 2 semaines, capable de mettre en rémission 4/6MC active pour une durée de 8 semaines (P Rutgeerts et col. Louvain) ;
- Le CNI-1493, inhibiteur de la MAP-kinase qui induit une inhibition du TNF, en perfusion à la dose de 8 ou 25 mg/m2 pendant 12 jours, est capable, dans une étude de phase II coordonnée par DW Holmes et col. (Amsterdam), de permettre une amélioration clinique chez 8/9 MC, une rémission chez 4/9, une disparition des lésions endoscopiques chez 6/9 MC ;
- L’acétate de médroxyprogestérone (MPA), progestatif aux propriétés anti-inflammatoires chez l’animal, après une dose de charge de 1 g toutes les 6 heures pendant 48 h puis 500 mg toutes les 12 h pendant 8 semaines, permet d’obtenir une réponse à 8 semaine chez 82 % des MC actives et une rémission chez 64 %, sans effet secondaire sévère (C Aronchick et col. Philadelphie) ;
- La DHEA, qui inhibe le TNFkB et l’interleukine 6, à la dose de 200 mg/j pendant 8 semaines permet, comme dans la RCH (cf. Journal Faxé de AGA 2000), de mettre en rémission 5/6 MC actives, 4/6 restent en rémission 8 semaines plus tard (T Andus et col. Regensburg).