Lettre mensuelle n°42 – Juin 2014 | Le dépistage du cancer colorectal, où en sommes-nous ?

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Chers amis,

La stratégie du dépistage du cancer colorectal, en France, fondée sur la recherche de sang occulte dans les selles va évoluer en 2015 vers le test immunologique qui permettra une amélioration de la sensibilité notable (70 %). Le test immunologique plus facile d’utilisation permettra de n’utiliser qu’un seul prélèvement de selles. Ceci suffira t-il a susciter l’adhésion nécessaire pour que cette campagne ait un impact significatif en terme de santé publique ?

Le taux de participation à la campagne d’hémoccult (30-35 %) débutée en 2008 n’était pas suffisant pour avoir un impact significatif sur la santé de la population (baisse de 9 % de la mortalité soit 1600 décès évités avec, en conséquence, une augmentation de 86 % du coût par année de vie gagnée par rapport au 3357 € prévu). 

Rappelons les chiffres que nous connaissons tous : 40 000 cas annuels, 18 000 décès, mais aussi 110 000 personnes hospitalisées dans les établissements de soins par an (première cause de cancer). Il faut savoir également que le cancer colorectal est la première cause de mortalité par cancer dans notre pays après 85 ans et que 40 % de ces cancers surviennent… après 74 ans… !

Bien que la coloscopie ait démontré depuis de nombreuses années son efficacité redoutable en terme de dépistage mais surtout de prévention sur le long terme (53 % de baisse de mortalité à 10 ans), il reste difficile de lui donner une place de choix au sein des instances publiques et même au sein de la profession. Aux Etats-Unis, où la méthode endoscopique a été progressivement privilégiée tout en laissant la place au libre arbitre, l’incidence de ce cancer baisse de 3,5 %/an et jusqu’à 6 %/an dans les états où l’adhésion est forte. La liberté laissée aux personnes dans leur méthode de dépistage ou de prévention (au choix), après une information éclairée permet une adhésion de 70 % ! Une société moderne peut-elle se passer d’informer que le test de dépistage proposé ne dépiste que 50 % des cancers (avec Hémoccult) ?

Dans le cadre du board cancer colorectal de l’Inca, le CREGG et les sociétés savantes ont demandé à l’Inca en début d’année dernière de cibler la communication non seulement sur la population à risque moyen mais aussi sur les populations à risque élevé et très élevé dans lesquelles la coloscopie est recommandée afin d’éviter les confusions fréquentes en pratique courante que nous constatons au quotidien…

Enfin, ce groupe travaille sur l’élaboration d’un compte rendu standardisé après le test de dépistage de manière à remonter des informations complètes et utilisables en terme de santé publique pour les structures de gestion.

Toutefois, un certain nombre de questions restent sans réponse :

  • Pourquoi exclure 45 % des cas incidents du dépistage (5 % avant 50 ans et 40 % après 74 ans) ?
  • Pourquoi ne pas communiquer et proposer la coloscopie qui a une efficacité redoutable en terme de dépistage mais surtout de prévention ?
  • Pourquoi des choix en terme de santé publique nationale ont-ils été faits sans étude médico-économique au préalable ?

Ces questions majeures pour la santé de notre population et la crédibilité de notre profession seront abordées lors de la journée de réflexion du CREGG le 27 septembre prochain et une place importante sera laissée pour un grand débat avec des responsables politiques et l’Inca.
Nous vous y attendons nombreux.

Dr Eric Vaillant, secrétaire général du Cregg
Dr Anne-Laure Tarrerias, présidente du Cregg
Dr Jean-Christophe Letard, secrétaire général adjoint du Cregg
Dr Pierre-Adrien Dalbiès, trésorier du Cregg