Quel petit matériel indispensable dans la salle d’endoscopie pour les examens standards ?

En 2003, 2 243 991 endoscopies ont été réalisées, soit 1 122 010 fibroscopies oso-gastro-duodénales et 941 828 coloscopies, les autres examens comprenant la recto-sigmoïdoscopie souple, l’écho-endoscopie, la cholangiographie rétrograde endoscopique ont augmenté de 10,85 %. L’entéroscopie quant à elle nécessite un matériel adapté à la longueur des endoscopes, elle est en recul par rapport à la vidéo-capsule.

Les douleurs épigastriques et le reflux gastro-osophagien représentent les indications principales (38,3 % et 34,4 %) de la fibroscopie oso-gastro-duodénale, les gestes associés les plus fréquents étant les biopsies qui sont en progression de 14,7 %, notamment au niveau de l’estomac, en raison de la bonne compréhension de l’infestation par l’Helicobacter pylori. En revanche, pour l’oesophage pathologique, le nombre de biopsies réalisées semble encore insuffisant (15 %) notamment en cas d’endo-brachy-osophage court (57,7 %). Des gestes thérapeutiques sont associés à une fibroscopie oso-gastro-duodénale dans 7,6 % des cas, les gastrostomies percutanées sont en première place, suivies du traitement endoscopique des varices oesophagiennes. Les autres gestes tels que les dilatations, prothèses oesophagiennes, les coagulations au plasma-Argon ou les sections par mucosectomie ou polypectomie augmentent également.

La polypectomie est aussi le principal geste thérapeutique associé à la coloscopie (23 %), un autre geste étant réalisé dans 2,5 % (coagulation au plasma-Argon, mucosectomie, dilatation, prothèse colique).

Le petit matériel commun aux gestes endoscopiques concerne le patient et le groupe soignant : tunique papier à usage unique et une alèze par patient ; des champs absorbant ; des pyjamas en tissu de bloc pour le personnel soignant ; des gants non stériles ; des compresses. Pour les fibroscopies oeso-gastro-duodénales, un cale-bouche est nécessaire (pouvant laisser passer l’oxygène en cas d’anesthésie générale) ainsi qu’un agent anesthésique local (xylocaïne ® spray ou gel), un lubrifiant de type KY ® et pour les vidéo-nasogastroscopies électroniques de la xylocaïne naphalozinée ainsi qu’une pince de Pfizer ® et des mèches de tamponnement local.

Les coloscopies nécessitent une partie de ces éléments plus des capuchons transparents de petite taille lors d’examens “zoom”permettant de bien se fixer contre la paroi afin de rester complètement immobile.

Des écouvillons à usage unique sont également indispensables soit de type « brosse », soit de type « lamelle spiralée ».

LA PRÉHENSION

Les prélèvements digestifs sont l’atout majeur de l’endoscopie, ils sont réalisés de façon mécanique à l’aide de pinces dont les mors en formes de cuillères, dents de requin ou crocodile, avoisinent 5 mm de long et fonctionnent selon 4 principes différents :

le pantographe où les mors se referment grâce à une articulation mécanique mise en tension par un câble ;

le fourreau passif où les mors cisaillent et entrent par traction à l’aide d’un câble, dans une gaine ;

la rotule articulaire qui associe les deux mouvements ci-dessus, la bille articulaire permettant de remplacer les articulations d’usinage plus onéreux ;

la pince à chambre d’aspiration multiple avec section par guillotine permet des prélèvements multiples en un seul passage.

Il existe des pinces dont les diamètres de la gaine externe et la longueur sont adaptés aux examens endoscopiques (vidéo-fibroscopie oso-gastro-duodénale ou coloscopie électronique conventionnelle ou endoscopes ultra-fins).

La taille des prélèvements apparaît corrélée à la grosseur des mors de la pince, la présence d’un dard métallique central n’étant pas obligatoire, voire dangereuse.

Les prélèvements sont mis immédiatement dans le fixateur, soit sur des morceaux de films radiologiques, soit dans des supports clos (plaquettes), ils sont numérotés puis référencés.

Le formol neutre permet toutes les colorations en particulier celles des mucines, des graisses et des cellules endocrines. Il a l’avantage, contrairement au liquide de Bouin, contenant des acides faibles, de ne pas altérer les structures nucléaires notamment l’ADN, ce qui permet d’appliquer dans un second temps des techniques de biologie moléculaire (le formol du commerce est concentré à 40 % et doit être dilué 10 fois). Le liquide de Bouin peut être utilisé ainsi que des fixateurs plus spécifiques ou une congélation pour des études en microscopie électronique.

L’extraction de corps étrangers nécessite des pinces plus longues parfois caoutchoutées de type “dents de crocodile” ou “dents de rat”. Les paniers de types Dormia ou les pièges à polypes peuvent être utilisés ainsi que des anses à filet pour les pièces et les piles. Il est utile d’avoir des over-tubes longs pour l’extraction d’objets supérieurs à 6 cm de longueur ainsi que des tulipes protectrices pour l’extraction d’objets acérés.

L’INJECTION

Elle s’effectue à l’aide de cathéters simples pour l’opacification (préambule à la pose d’une prothèse digestive), à l’aide de cathéter spray pour les colorations vitales ou d’aiguilles à usage unique pour le tatouage, l’hémostase, le traitement des varices osophagiennes, la mucosectomie «plan de clivage sous muqueux sécuritaire» ou le traitement du reflux par Enteryx ®.

Le tatouage utilise de l’encre de chine ce qui peut être pratique pour le marquage des polypes avant intervention chirurgicale ou la surveillance des endo-brachy-osophages notamment en cas de destruction par plasma Argon.

Les colorants nécessaires sont le lugol pour les cancers épidermoïdes de l’osophage, le bleu de méthylène pour les zones de métaplasie intestinale dans l’endo-brachy-osophage ou la cavité gastrique, l’indigo carmin dilué à 2 % utile dans le colon et qui peut être associé au zoom pour l’analyse de l’endo-brachy-osophage (l’acide acétique pouvant être une alternative pour la muqueuse de Barrett).

L’hémostase par injection s’effectue avec de l’adrénaline diluée à 1/10000ème pour les ulcères gastro-duodénaux, les syndromes de Mallory Weiss ou les ulcérations aiguës de Dieulafoy et les polypes voire les diverticules hémorragiques. L’adrénaline est d’un faible coût, elle rend l’ulcère exsangue par son effet de tamponnement local, vaso-constricteur et stimulant de l’agrégation plaquettaire. Des volumes supérieurs à 10 ml sont souvent nécessaires, les points de ponction étant à la périphérie voire au centre de la lésion en cas de Forrest Ia. L’épinéphrine donne des résultats similaires en terme d’efficacité immédiate allant de 83 à 92 % avec des récidives dans 17 à 42 % des cas. Le polidocanol à 1 % est utilisé pour les varices oso-gastriques. Le matériel d’injection est de plus en plus performant avec des aiguilles de 18 à 23 Gauges, ayant un parfait coulissement dans des cathéters de 7 à 8 French et pour certaines un système permettant le lavage . Des colles biologiques peuvent être utilisées avec des nouvelles aiguilles à deux chambres. En cas d’hémorragie digestive, une pompe de type water-jet peut être utile.

LES CLIPS ET LA LIGATURE

Les méthodes d’hémostase mécaniques comprennent les clips et ligateurs, elles sont efficaces par pression/strangulation puis thrombose et escarre. Les systèmes de clippage réutilisables comportent : le clip (lamelle d’accrochage, cylindre de fermeture, mors) ; le système de transmission (câble d’ancrage du clip avec ergot, gaine spiralée d’avancée du cylindre de fermeture et une gaine protectrice) ; la poignée pour manipuler la gaine, accrocher le clip à son ergot (bouton noir) et fermer les mors par traction. Une rotation du clip est possible à l’extérieur de la gaine sans lâcher le ressort de transmission du mouvement mécanique et l’ouverture maximale du clip s’effectue dans la première partie du mouvement de fermeture par avancée du cylindre de fermeture sur un pantographe situé au bord proximal des mors du clip. Les mors sont de nombre variable (2 à 3), ils ont des tailles (6 à 12 mm) et des angulations différentes selon les modèles (90 à 135°). Des systèmes à usage unique existent avec seulement deux mouvements : mobilité de la gaine et fermeture soit par traction, soit par poussée sur la poignée (certains modèles peuvent être fermés et ouverts de façon itératives). Les clips sont efficaces dans 84 à 100 % des cas avec en moyenne 2,8 +- 1,6 clips, trois clips au maximum étant pris en charge dans le remboursement de ces dispositifs médicaux implantables en cas d’hémorragie digestive. Les échecs de clippage apparaissent lors d’ulcères gastro-duodénaux supérieurs à 1,5 cm de la partie haute et postérieure de l’estomac ou de la face postérieure du bulbe. Le clippage est actuellement préféré au traitement thermique et associé à des injections d’épinéphrine ; son efficacité prolongée est bonne avec 2 à 4,5 % de re-saignement seulement. Les clips peuvent servir au marquage lésionnel ou à la fermeture de brèches digestives.

La ligature s’est imposée au niveau du traitement des varices oso-gastriques, elle peut être utilisée également pour les hémorroïdes hémorragiques stade II- III. Il existe des systèmes à usage unique, de 6 à 10 élastiques ayant des tailles adaptables aux fibroscopes ou coloscopes. Certains modèles sont sans latex pour les personnes allergiques, et l’avant-dernier élastique habituellement a une couleur différente permettant son repérage. Les ligatures ont été utilisées pour l’hémostase d’ulcérations aiguës de Dieulafoy, d’ulcérations thermométriques et de syndrome de Mallory-Weiss. Le largage s’effectue béquillages relâchés après aspiration et remplissage de la chambre transparente d’aspiration, à l’aide d’une poignée rotative se fixant sur le canal opérateur par un mandrin et fonctionnant par un fil en corde ou métallique. Pendant la phase d’aspiration, des petits mouvements de « va et vient » sont souvent utiles. Les mini-loops fonctionnant sur le principe du clip à usage unique peuvent aussi être utilisées notamment au niveau du cardia. Les endo-loops sont très utiles dans le but de prévenir une hémorragie post polypectomie ; il ne faut pas les utiliser en cas de polype à pied court ou fin.

LA DILATATION

Elle nécessite une opacification préalable soit par la technique radiologique conventionnelle, soit par opacification perendoscopique à l’aide d’un cathéter fin et de produit de contraste. Elle s’effectue sur fil guide rigide, métallique ou semi-souple, à l’aide de bougies de dilatations de diamètres croissant ou de ballons à usage unique dont certains ont un diamètre variable en fonction de la pression. Les ballons passent désormais dans le canal opérateur et la dilatation se fait à l’eau à l’exception des achalasies (air) et sous contrôle de la vue et/ou radioscopique.

LA COAGULATION

La coagulation peut être monopolaire (APC), bipolaire, parfois multipolaire ou à l’aide de pinces chaudes de type Heat Probe. Des anses, des couteaux peuvent être utilisés. La coagulation est utile dans la destruction et l’hémostase.

Les méthodes thermiques correspondent aux différents modes de coagulation (pédale bleue) qui créent un arrêt du saignement (artériole de 2 mm) puis une rétraction du vaisseau avec cratère blanchâtre, les techniques laser étant de moins en moins utilisées. La coagulation monopolaire, laisse diffuser le courant électrique de haute fréquence au travers du patient et nécessite une plaque/patient, elle s’effectue : au contact avec les pinces chaudes ou bistouris, efficaces dans 96 % des cas (25 à 40 W, impulsions prolongées de 7 à 10 secondes) ; à distance de 3 à 5 mm pour la coagulation au plasma Argon, attractive par son rapport coût/efficacité et sa multifonction (60 W, 0,8 à 1,5 L/mn). La coagulation bipolaire ou multipolaire (3 électrodes) a l’avantage de ramener le courant électrique au générateur (utile en cas de pacemaker), les sondes sont munies d’un filament latéral spiralé à l’extrémité distale (10 à 20 W, 3 à 4 impulsions de 10 à 14 secondes de 30 joules par impulsion). Le contact doit être tangentiel car l’extrémité distale de la sonde est perforée et libre de conducteur ce qui autorise le lavage. Pour certains modèles de sondes, il existe en plus une aiguille d’injection distale. La sonde chaude peu utilisée en France est constituée d’un thermocouple interne pouvant créer une température constante de 250° à l’extrémité distale (recouvert d’un anti-adhésif). Ce système comporte trois canaux de lavage 1 cm au dessus de la portion distale active (impulsions de 8 secondes à 30 joules).

LA SECTION

Les techniques de section s’effectuent avec du courant à haute fréquence et une tension suffisante (entre 200 et 500 Volts) pour créer des arcs électriques entre l’anse diathermique. On utilise des bistouris électriques de dernière génération permettant de stabiliser automatiquement la différence de potentiel et l’intensité.

La température produite aux points où l’arc électrique touche les tissus est si élevée que ces derniers sont immédiatement vaporisés. Puis au fur et à mesure que l’anse les traverse, les arcs électriques sont produits en continu partout où la distance entre l’anse et les tissus est suffisamment réduite, produisant ainsi la section. La mucosectomie est une section muqueuse qui est apparue en 1973 avec Dehle et al qui ont développé la méthode «inject and cut ». L’idée était de créer un plan de clivage sécurisant au niveau de la sous muqueuse. En 1976, Martin et al ont décrit la méthode « lift and cut » qui nécessite deux endoscopes ou deux canaux opérateurs. Makuuchi et Inoue ont par la suite développé un over-tube osophagien et surtout le concept des capuchons transparents permettant le « suck and cut ». Depuis, des ligatures ont été utilisées par Shim et al pour réaliser le « suck » et très récemment, de nouveaux procédés ont vu le jour : couteaux diathermiques sécurisés ou over-tubes permettant le passage de trois instruments pour réaliser la section ; anses spéciales autorisant une aiguille permettant l’ « inject and cut ».

Il est utile d’avoir des anses de différents types : monobrin, multibrin, de petite taille, de grande taille, asymétrique pour les mucosectomies osophagiennes ou avec picots pour les grosses mucosectomies coliques. Ces anses sont rotatives pour certains modèles. Des capuchons transparents avec rainure périphérique pour fixer l’anse et encoche à six heures, sont utilisés pour l’osophage. Du sérum physiologique ou de la hyaluronidase sont employés pour l’« inject and cut ».

LES PROTHÈSES DIGESTIVES

Les procédés d’assemblage des modules en aciers ou le développement d’alliages tels le nitinol (nickel, titane) et l’elgiloy (fer, cobalt) on permis la fabrication de prothèses auto-expansives, contraintes sous une membrane permettant l’accès à l’intubation de l’estomac, du duodénum ou du colon. Elles ont l’avantage de nécessiter une dilatation minimale (7 à 11 mm) et leur souplesse ainsi que la maniabilité de leur système de pose ont permis l’utilisation des prothèses auto-expansives dans le drainage des obstacles bilio-pancréatiques. La plupart des prothèses digestives actuelles sont en acier trempé (assemblage de portions articulées de 2,5 cm de diamètres, ne raccourcissant pas lors de son expansion), en nitinol ou elgiloyl (tressage ou maillage d’un ou plusieurs fils voire découpage dans la masse d’un tube creux par laser, se raccourcissant au fur et à mesure de son expansion (30 %)), auto-expansives, radio-opaques avec pour certaines une membrane de couverture évitant l’obstruction par pénétration tumorale au travers du maillage de la prothèse. Cette membrane recouvre le plus souvent les ¾ médians de la prothèse, une obstruction pouvant apparaître aux pôles supérieurs et inférieurs nécessitant une désobstruction thermique ou mécanique (envahissement tumoral ou prolifération d’un tissu de granulation par activation de l’angiogenèse). Le désavantage de la couverture étant le risque accru de migration. La forme des prothèses est droite avec ou sans extrémités évasées ; des systèmes d’ancrage, d’extraction ou de valves anti-reflux sont apparus, spécialisant le matériel.

Le matériel nécessaire à leur pose correspond à un cathéter d’opacification si nécessaire, un fil-guide, la prothèse s’étant positionnée « through ou over the scope ». Des clips peuvent être utiles pour fixer le pôle supérieur de la prothèse en cas de sténose peu serrée.

Une sonde de gastrostomie doit aussi être présente dans le stock.

L’endoscopie est de plus en plus accessible à tous (formation initiale et continue sur robots ou modèles expérimentaux animaux) et les examens standards comprennent la thérapeutique d’où la nécessité d’avoir un stock bien répertorié de petit matériel indispensable dans la salle d’endoscopie.

Jean-Christophe LETARD
(Poitiers)