Le CREGG s’engage dans la prévention du cancer colorectal

Le cancer colorectal (CCR) touche plus de 42 000 de nos compatriotes chaque année et 18 000 personnes en décèdent après une ou plusieurs interventions chirurgicales et des traitements lourds comme la radiothérapie ou la chimiothérapie qui peuvent durer parfois plusieurs années.

Le CCR découvert au stade métastatique (dans 50% des cas dans notre pays) offre un taux de guérison de 5% en moyenne à 5 ans sous chimiothérapie et de 20% lorsque les métastases peuvent être retirées chirurgicalement. Sans métastase les chances de guérison sont nettement plus importantes autour de 70 % et jusqu’à près de 100 % en cas de petit (cancer stade 1). En cas de métastases, si l’intervention chirurgicale n’est pas possible, la médiane de survie est située entre 26 et 28 mois sous chimiothérapie (dite palliative) quasiment en permanence.

112 000 personnes sont hospitalisées par an dans notre pays pour subir un traitement du cancer colorectal dans notre pays, c’est la première cause d’hospitalisation pour cancer. Le cancer colorectal devient, après 85 ans, dans notre pays, la première cause de mortalité par cancer.

Les résultats de la campagne de dépistage instaurée depuis 2008 sont insuffisants en terme de santé publique puisque la participation de la population est insuffisante, l’incidence et la mortalité ne baisse pas. La stratégie reposant sur une méthode unique n’a d’autre part fait l’objet d’aucune évaluation médico-économique ou comparative avec la coloscopie malgré la pléthore d’agence de santé publique chargée de prévention. En effet, les moyens engagés n’ont pas permis d’obtenir un taux de participation de la population qui permet d’espérer une baisse notable de la mortalité par CCR et de l’incidence.

Avec un taux de participation autour de 35% l’objectif initialement prévu de 50% est très loin. Ce taux de participation ne permet d’espérer qu’une baisse de 9% de la mortalité par cancer CCR dans notre pays c’est-à-dire, sur les 18 000 décès annuels, une baisse de 1620 décès sans impact en terme de prévention soit toujours 42 000 personnes atteintes chaque année. En effet, le test Hémoccult a la capacité pour dépister le cancer colorectal de 50% (sensibilité du test). Le test immunologique qui va le remplacer prochainement permettra d’augmenter cette sensibilité à 70-75 %. Il n’en restera pas moins que 25-30% des CCR ne seront pas dépistés par cette méthode ainsi que la plupart des lésions pré-cancéreuses (adénomes) qui ne saignent pas lorsqu’elles ne sont pas dégénérées. D’autre part 4,2 % des CCR sont des cancers d’intervalles découverts entre la réalisation de 2 tests, ces cancers ont souvent un pronostic moins bon.

Pourtant, ce cancer est évitable dans la majorité des cas si les lésions pré-cancéreuses sont dépistées et retirées endoscopiquement. En effet les polypes (adénomes surtout) qui se développent pendant plusieurs années (8 ans en moyenne pour dégénérer en cancer) au cours d’une coloscopie. De nombreuses études ont démontré depuis de très nombreuses années que l’exérèse des polypes réduisait le risque de survenu du cancer de 70 à 90 % et par conséquent la mortalité qui lui est liée.

Ainsi certains pays avec un niveau socio-économique élevé se sont engagés depuis de nombreuses années dans une stratégie ouverte permettant à la population le choix dans les méthodes de dépistage après une information sur les bénéfices et les risques.

Aux Etats unis, la population est informée et choisi entre une recherche de sang occulte dans les selles et une méthode endoscopique qui est laissée au libre arbitre des personnes. Cette stratégie a permis une réduction de l’incidence du cancer colorectal de 3.5% et jusqu’à 6% par an, ce qui confirme que le nombre de CCR annuel peut être réduit.

Cette stratégie a été adoptée en Allemagne en 2008 en introduisant la coloscopie comme une méthode de dépistage alternative à l’Hemoccult qui a été mis en place en 1974 dans ce pays. Les allemands estiment avoir depuis 2008 évité 100 000 CCR. D’autre part, depuis 2007, la World Gastroenterology Organisation recommande dans les pays où l’endoscopie est assez facilement accessible (comme en France), d’effectuer un dépistage national du CCR par une méthode endoscopique qui permet d’avoir un effet préventif, les méthodes de recherche de sang dans les selles étant réservées au pays ne disposant pas des ressources nécessaires.

La méthode par coloscopie a l’avantage d’avoir un effet préventif avec une baisse importante de l’incidence du CCR à 5 ans et jusqu’à 10 ans. De nombreuses études scientifiques l’ont démontré et leur pratique incite les Gastro-enterologues Français a recommander de privilégier la prévention au détriment du dépistage avec un objectif réaliste de baisser l’incidence du CCR de 3 % par an.

Le conseil d’administration du CREGG composé de Gastro-entérologues libéraux et de membres des principales sociétés savantes de Gastro-entérologie a décidé de s’engager pour une prévention active afin de réduire significativement le nombre de CCR dans notre pays et d’inciter les autorités publiques à intensifier cette prévention. Il s’engage a informer la population sur les niveaux de risques et sur le niveau de protection des différentes méthodes proposées. Des études reprises dans une recommandation d’expert récente de la société Française d’endoscopie digestive (SFED) sont concordantes pour considérer certains facteurs de risque personnels et établir ainsi un score prédictif de risque élevé (>5%). Le CREGG a décidé de porter à la connaissance du public le calcul de ce score afin que chacun puisse évaluer son risque au regard des données scientifiques les plus récentes (cf fiche mémo N°7)

Le CREGG diffusera donc sur son site et par l’intermédiaire de fiches papiers dans les cabinets des Gastro-enterologues une information sur les méthodes de dépistage et de prévention actuelles, les différents niveaux de risques avec des recommandations précises.

Risque moyenRisque élevéRisque très élevé
    Pas de critère des groupes risque élevé ou très élevé Pas de symptômes coliques Toute personne de plus de 50 ans. Le risque augmente régulièrement avec l’âge, il est important après 85 ans. l’utilisation du score* peut permettre de se considérer comme à risque élevé si > ou égal à 4         Maladies inflammatoires du tube digestif : Crohn ou Rectocolite hémorragique ATCD de polypes sur une coloscopie antérieure Acromégalie ATCD de cancer colorectal opéré (il faut surveiller le colon restant) ATCD familiaux de CCR du 1 er du second degré. ATCD familiaux de polype au premier degré Facteurs de risque personnels (élément du score) *       Syndrome génétiques :   syndrome de Lynch polypose adénomateuse familiale personnes porteuses de la mutation    

Pour établir son score, faire la somme des points :

  • sexe :  
    • masculin = 2
    • féminin = 0
       
  • âge :  
    • 40-49 = 0
    • 50-54 = 1
    • 55-59 = 2
    • 60 et plus = 3
       
  • diabète = 1
  • tabac :  
    • <20 paquets-années = 1
    • >20 =2
       
  • poids :   
    • IMC>30 =1 (sauf pour la femme)
       
  • alimentation à risque  
    • comptez 0 pour régulier ou 1 pour occasionnel pour les consommations suivantes : légume vert, poisson, viande blanche volaille
    • inversement 1 pour régulier ou 0 pour occasionnel pour riche en viande rouge (2 points si régulier), aliments frits et alcool.
       
  • ATCD familiaux de CCR au 1er degré :  
    • >60 ans = 1
    • <60 ans = 2
       

Si le score est > ou égal à 4 : risque élevé de CCR > 5 %

Les recommandations du CREGG

Le conseil d’administration du CREGG recommande unanimement à chaque Français de s’interroger sur son niveau de risque de cancer colo-rectal (CCR) et sur les méthodes de dépistage et de prévention actuellement recommandées (niveau de protection) puis de faire un choix personnel adapté en fonction des ses aspirations et de ses propres risques. Si besoin ce choix peut se faire à l’aide d’un score* permettant de définir un risque élevé et en concertation avec le médecin traitant ou un Gastro-enterologue. La journée nationale de prévention organisée chaque année par toute la profession fin mars a pour objectif de permettre à la population de rencontrer les Gastro-enterologues (secteur privé et publique) afin d’obtenir toutes les informations permettant un choix éclairé.

Les données scientifiques actuelles et l’expérience des pays les plus avancés en matière de prévention nous incitent à donner les recommandations suivantes :

Les deux méthodes principales sont la recherche de sang dans les selles (test Hémoccult ou test immunologique) et la coloscopie. Attention, pour le diagnostic (lorsqu’il existe des symptômes) seule la coloscopie est recommandé car les autres méthodes ont une sensibilité trop faible pour diagnostiquer une maladie potentiellement grave comme le cancer, d’autre méthodes sont utilisables en cas de contre indication à la coloscopie.

A partir de 50 ans, un dépistage systématique est recommandé pour chacun

  • Dans le groupe à risque moyen, après une information éclairée, les personnes peuvent choisir entre une coloscopie ou une recherche de sang dans les selles (Hémoccult ou test immunologique). Le choix entre ces 2 méthodes doit principalement être guidé par la volonté de prévention et une appréciation du risque. Risque de passer à côte d’un cancer par méthode de recherche de sang occulte dans les selles et risque de la coloscopie. Ces 2 méthodes peuvent être associés mais pas en même temps. le score* de risque peut être utilisé. En cas de score > ou = à 4 le risque de développer un CCR est considéré comme > 5 % (élevé) et une coloscopie est plutôt recommandée. La réalisation d’une coloscopie de dépistage permet aussi de préciser s’il existe des polypes et ainsi d‘être considéré à risque élevé et ainsi de faire l’objet d’une surveillance régulière par coloscopie qui réduit le risque au dessous du risque moyen.
  • Dans les groupes à risques élevés et très élevés la surveillance doit se faire par coloscopie à l’exclusion de toute autre méthode. Le rythme des coloscopies par la suite dépendra des constatations lors de l’examen initial (présence de polypes coliques à haut risque ou à bas risque), les recommandations de surveillance et les écarts entre les coloscopies sont recommandés selon un schéma établi par les experts français avec l’HAS (recommandation de suivi post-polypectomie).
  • Les autres méthodes de dépistage peuvent être utilisées en cas de contre-indication à la coloscopie (contre indication essentiellement d’ordre anesthésique)
  • L’âge ne peut éthiquement être considéré une contre-indication à la prévention et au dépistage. Il est important de poursuivre la prévention et le dépistage au-delà de 74 ans (40% des cancers surviennent après 74 ans) car le risque de CCR augmente régulièrement avec l’âge et que ce cancer est la première cause de mortalité par cancer après 85 ans en France. L’âge limite doit prendre en considération les éléments suivant : antécédents médicaux et en particulier cardio-vasculaires, autonomie, espérance de vie. En pratique le dépistage et la prévention reste indiqués chez les personnes âgées autonomes sans comorbidités qui rendraient l’anesthésie trop risquée.
Risque moyenRisque élevéRisque très élevé
  A partir de 50 ans Test immunologique ou coloscopie totale Le risque peut être précisé par :   utilisation des scores coloscopie (présence de polypes)     PUIS   Pas de polype : recherche sang dans les selles à 5 ans puis tous les 2 ans
Ou coloscopie entre 5 et 10 ans selon score     Polype : coloscopie selon les recommandations de suivi HAS    
  Coloscopie à partir de 50 ans   PUIS Coloscopie de contôle dont le rythme est défini par les recommandations HAS post polypectomie Polype a bas risque : 5 ans Polype à haut risque : 3 ans     Coloscopie à débuter en fonction de l’anomalie génétique   PUIS Coloscopie tous les 2 ans Avec chromoendoscopie (coloration)  

* Calcul du score, faire la somme des points :

  • sexe :  
    • masculin = 2
    • féminin = 0
       
  • âge :  
    • 40-49 = 0
    • 50-54 = 1
    • 55-59 = 2
    • 60 et plus = 3
       
  • diabète = 1
  • tabac :   
    • <20 paquets-années = 1
    • >20 = 2
       
  • poids :  
    • IMC>30 = 1 (sauf pour la femme)
       
  • alimentation à risque :  
    • comptez 0 pour régulier ou 1 pour occasionnel pour les consommations suivantes : légume vert, poisson, viande blanche volaille
    • inversement 1 pour régulier ou 0 pour occasionnel pour riche en viande rouge (2 points si régulier) aliments frits et alcool
       
  • ATCD familiaux de CCR au 1er degré :   
    • >60 ans =1
    • <60 ans = 2
       

Si le score est > ou égal à 4 : risque élevé de CCR > 5 %